Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome7.djvu/466

Cette page n’a pas encore été corrigée

4H6 JULES CÉSAR.

C’est vous (jui dos tjrans punissez riiijiistice. INi les superbes tours, ni les portes d’airain, Ni les gardes armés, ni les chaînes de fer. Rien ne retient un bras que le courage anime ; Rien n’ôte le pouvoir qu’un homme a sur soi-même. N’en doute point, Casca, tout mortel courageux Peut briser à son gré les fers dont on le charge.

CASCA.

Oui, je m’en sens capable ; oui, tout homme en ses mains Porte la liberté de sortir de la vie.

CASSIUS.

Et pourquoi donc César nous peut-il opprimer ? Il n’eût jamais osé régner sur les Romains ; Il ne serait pas loup, s’il n’était des moutons ’. Il nous trouva chevreuils, quand il s’est fait lion. Qui veut faire un grand feu se sert de faible paille. Que de paille dans Rome, et que d’ordure, ô ciel ! Notre indigne bassesse a fait toute sa gloire. Mais que dis-je ? ô douleurs ! où vais-je m’emporter ? Devant qui mes regrets se sont-ils fait entendre ? Êtes-vous un esclave ? êtes-vous un Romain ? Si vous servez César, ce fer est ma ressource : Je ne crains rien de vous, je brave tout danger.

CASCA.

Vous parlez à Casca, que ce mot vous suffise :

Je ne sais point flatter César par des rapports.

Prends ma main, parle, agis, fais tout pour sauver Rome.

Si quelqu’un fait un pas dans ce noble dessein,

Je le devancerai ; compte sur ma parole.

CASSIUS.

Voilà le marché fait : je veux te confier Que de plus d’un Romain j’ai soulevé la haine. Ils sont prêts à former une grande entreprise. Un terrible complot, dangereux, important. Nous devons nous trouver au porche de Pompée : Allons, car à présent, dans cette horrible nuit. On ne peut se tenir, ni marcher dans les rues. Les éléments armés, ensemble confondus,

1. L(j loup et los moutons ne gâtent point les beautés de co morceau, parce que les Anglais n’attachent point à ces mots une idée basse : ils n’ont point le proverbe qui se fait brebis, le loup le mange. [Noie de Voltaire.)