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ACTE QUATRIÈME.




Scène I.



YDACE, LA PRÊTRESSE ; GARDES, dans le fond.


YDACE.[1]

Non, je ne cache plus ma tendresse fatale ;
Je l’aimais, je l’avoue, et l’amour nous égale.
Non, ne ménagez plus ce cœur né pour souffrir ;
J’appris à vivre esclave, et j’apprends à mourir ;
Ne me déguisez rien, je pourrai tout entendre.
Je sais que dans ces lieux le roi devait se rendre ;
C’est un père outragé, c’est un maître absolu :
On dit qu’il a parlé ; mais qu’a-t-il résolu ?

LA PRÊTRESSE.

Il flottait incertain ; son âme s’est montrée
De douleur affaiblie, et de sang altérée.
Tantôt par un seul mot il nous glaçait d’horreur,
Et surtout son silence inspirait la terreur ;
Tantôt la profondeur de sa sombre pensée
Échappait aux regards d’une foule empressée.
Il soupire, il menace ; il se calme, il frémit :
Pour le seul Elpénor on croit qu’il s’adoucit.
Autour de lui rangés ses courtisans le craignent,
Et dans son désespoir il en est qui le plaignent.

YDACE.

Ils plaignent un tyran ! bas esprits ! vils flatteurs !
Ils n’osent plaindre Argide ! ils lui ferment leurs cœurs !
Ils croiraient faire un crime en prenant sa défense.

  1. Ici Ydace ne doit plus se contenir dans les bornes d'une douleur modeste; elle doit paraître en désordre, les cheveux épars, et éclater en sanglots. (Note de Voltaire.)