Tu n’en as que la fange où le ciel le fit naître.
Il a su la couvrir par les vertus d’un maître ;
Et tes égarements, qui l’ont trop démenti,
T’ont remis dans le rang dont il était sorti.
Ils m’ont laissé ce bras pour punir un perfide.
Seigneur, le roi vous mande.
Oui, j’obéis… Argide,
Voilà ton dernier trait ; mais tremble à mon retour.
(Il sort.)
Je t’attends : nous verrons avant la fin du jour
Si la férocité, la menace, et l’outrage,
Ou cachaient ta faiblesse, ou montraient ton courage.
Scène III.
Qu’ai-je entendu, seigneur ? et quel ardent courroux
Arme à mes yeux surpris et votre frère et vous ?
Hélas ! je vous ai vus ennemis dès l’enfance ;
Mais ai-je dû m’attendre à tant de violence ?
Vous me faites frémir.
Vos conseils me sont chers ;
Mais j’appris de vous-même à braver les pervers :
Je l’appris encor plus dans Sparte et dans Athène.
Elpénor, condamnez ma franchise hautaine ;
Mon cœur, je l’avouerai, n’est pas fait pour la cour.
Il est libre, il est grand ; mais, seigneur, si l’amour,
Mêlant à vos vertus ses faiblesses cruelles,
Allume entre vous deux ces fatales querelles !
On le soupçonne au moins.
Ah ! ne redoutez rien ;
Je ne sais point former un indigne lien.