Pour délivrer l’enfant que les dieux m’ont laissé.
Des premiers jours de paix je saisis l’avantage ;
Je reviens arracher Ydace à l’esclavage :
Aux pieds de ton tyran j’apporte sa rançon ;
Et, dès que l’avarice ouvrira sa prison,
Je retourne à Carthage achever ma carrière.
Là je ne verrai point, couchés dans la poussière,
Sous les pieds d’un tyran les mortels avilis :
Je mourrai libre au moins… Va, sers dans ton pays.
Tu ne partiras point sans me coûter des larmes.
Sous ce roi que tu hais je porte ici les armes ;
Nos devoirs différents n’ont point rompu les nœuds
De la vieille amitié qui nous unit tous deux.
J’ai vu ta fille Ydace ; et partageant ses peines,
Autant que je l’ai pu, j’ai soulagé ses chaînes.
Tu m’attendris, Égeste… Est-ce auprès de ces murs
Qu’elle traîne ses jours et ses malheurs obscurs ?
Où la trouver ? Comment me rendrai-je auprès d’elle ?
Dans les débris d’un temple est sa prison cruelle,
Auprès de cette place, et non loin du séjour,
De ce séjour superbe où le roi tient sa cour.
Une cour ! des prisons ! quel fatal assemblage !
Ainsi le despotisme est près de l’esclavage.
Ce palais est bâti des marbres qu’autrefois
L’heureuse liberté consacrait à nos lois.
Ne pourrai-je à mon sang parler sous ces portiques ?
Je les ai vus ornés de nos dieux domestiques :
Mais nos dieux ne sont plus… Puis-je au moins présenter
Cette faible rançon que je fais apporter ?
Agathocle, ton roi, daignera-t-il m’entendre ?
A ce détail indigne il ne veut plus descendre ;
Sa grandeur abandonne à l’un de ses enfants
Du lucre des combats les soins avilissants.
A qui dans ma douleur faut-il que je m’adresse ?
A son fils Polycrate, objet de sa tendresse,