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Cimenté de leur sang, entouré de rapines.
Vous me verrez, ingrat, sur ces vastes ruines,
De l'hymen qu'on réprouve allumer les flambeaux
Au milieu des débris, du sang, et des tombeaux.

léonce

Voilà donc les horreurs où la grandeur suprême,
Alors qu'elle est sans frein, s'abandonne elle-même !
Je vous plains de régner.

alexis

Je me suis emporté :
Je le sens, j'en rougis ; mais votre cruauté,
Tranquille en me frappant, barbare avec étude,
Insulte avec plus d'art, et porte un coup plus rude.
Retirez-vous ; fuyez.

léonce

J'attendrai donc, seigneur,
Que l'équité m'appelle, et parle à votre coeur.

alexis

Non, vous n'attendrez point : décidez tout à l'heure
S'il faut que je me venge, ou s'il faut que je meure.

léonce

Voilà mon sang, vous dis-je, et je l'offre à vos coups.
Respectez mon devoir ; il est plus fort que vous.

Il sort.



Scène IV

.

alexis

Que son sort est heureux ! Assis sur le rivage,
Il regarde en pitié ce turbulent orage
Qui de mon triste règne a commencé le cours.
Irène a fait le charme et l'horreur de mes jours :
Sa faiblesse m'immole aux erreurs de son père,
Aux discours insensés d'un aveugle vulgaire.
Ceux en qui j'espérais sont tous mes ennemis.
J'aime, je suis césar, et rien ne m'est soumis !
Quoi ! Je puis sans rougir, dans les champs du carnage,
Lorsqu'un scythe, un germain succombe à mon courage,
Sur son corps tout sanglant qu'on apporte à mes yeux,
Enlever son épouse à l'aspect de ses dieux,
Sans qu'un prêtre, un soldat, ose lever la tête !