Sa gloire de si loin m'a trop intéressée.
César aura surpris au fond de ma pensée
Quelques voeux indiscrets que je n'ai pu cacher,
Et qu'un époux, un maître, a droit de reprocher.
C'était pour alexis que le ciel me fit naître :
Des antiques césars nous avons reçu l'être :
Et dès notre berceau l'un à l'autre promis,
C'est dans ces mêmes lieux que nous fûmes unis :
C'est avec alexis que je fus élevée ;
Ma foi lui fut acquise et lui fut enlevée.
L'intérêt de l'état, ce prétexte inventé
Pour trahir sa promesse avec impunité,
Ce fantôme effrayant subjugua ma famille ;
Ma mère à son orgueil sacrifia sa fille.
Du bandeau des césars on crut cacher mes pleurs ;
On para mes chagrins de l'éclat des grandeurs.
Il me fallut éteindre, en ma douleur profonde,
Un feu plus cher pour moi que l'empire du monde ;
Au maître de mon coeur il fallut m'arracher,
De moi-même en pleurant j'osai me détacher.
De la religion le pouvoir invincible
Secourut ma faiblesse en ce combat pénible ;
Et de ce grand secours apprenant à m'armer,
Je fis l'affreux serment de ne jamais aimer.
Je le tiendrai... ce mot te fait assez comprendre
À quels déchirements ce coeur devait s'attendre.
Mon père à cet orage ayant pu m'exposer,
M'aurait par ses vertus appris à l'apaiser ;
Il a quitté la cour, il a fui Nicéphore ;
Il m'abandonne en proie au monde qu'il abhorre :
Et je n'ai que toi seule à qui je puis ouvrir
Ce coeur faible et blessé que rien ne peut guérir.
Mais on ouvre au palais... je vois Memnon paraître.
Scène II
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Eh bien ! En liberté puis-je voir votre maître ?
Memnon, puis-je à mon tour être admise aujourd'hui
Parmi les courtisans qu'il approche de lui ?