Vous voulez que Cydon cède au joug de la Crète ;
Portez celui des dieux dont je suis l’interprète :
Mais voici la victime[1].
Scène III.
La pitié qui vous touche a pénétré mon cœur.
Que dans la Grèce encore il est de barbarie !
Que ma triste raison gémit sur ma patrie !
Captive des crétois, remise entre mes mains,
Avant d’entendre ici l’arrêt de tes destins,
C’est à toi de parler, et de faire connaître
Quel est ton nom, ton rang, quels mortels t’ont fait naître.
Je veux bien te répondre. Astérie est mon nom ;
Ma mère est au tombeau ; le vieillard Azémon,
Mon digne et tendre père, a, dès mon premier âge,
Dans mon cœur qu’il forma fait passer son courage.
De rang, je n’en ai point ; la fière égalité
Est notre heureux partage, et fait ma dignité.
Sais-tu que Jupiter ordonne de ta vie ?
Le Jupiter de Crète, aux yeux de ma patrie,
Est un fantôme vain que ton impiété
Fait servir de prétexte à ta férocité.
Apprends que ton trépas, qu’on doit à tes blasphèmes,
Est déjà préparé par mes ordres suprêmes.
Je le sais, de ma mort indigne et lâche auteur ;
Je le sais, inhumain, mais j’espère un vengeur.
- ↑ Tantôt Pharès apparaissait à Voltaire sous les traits de l’évêque de Cracovie, tantôt sous la figure de Christophe de Beaumont, archevêque de Paris. (G. A.)