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Montrant Mégatise.
Est-ce ta sœur, ou lui ? Parle avant ton supplice.
Tu ne me réponds rien… Quoi ! lorsqu’en ta faveur
Nous offensions, hélas ! nos dieux, notre empereur ;
Quand nos soins redoublés et l’art le plus pénible
Trompaient pour te sauver ce pontife inflexible ;
Quand, tout prêts à partir de ce séjour d’effroi,
Nous exposions nos jours et pour elle et pour toi,
De nos bontés, grands dieux ! Voilà donc le salaire !

ARZAME

Malheureux ! Qu’as-tu fait ? Non, tu n’es pas mon frère.
Quel crime épouvantable en ton cœur s’est formé ?
S’il en est un plus grand, c’est de t’avoir aimé.

LE JEUNE ARZÉMON, à Cézène.

A la fin je retrouve un reste de lumière…
La nuit s’est dissipée… un jour affreux m’éclaire…
Avant de me punir, avant de te venger,
Daigne répondre un mot : j’ose t’interroger…
Ton frère envers nous deux n’était donc pas un traître ?
Il n’allait pas livrer ma sœur à ce grand-prêtre ?

CÉSÈNE

La livrer, malheureux ! Il aurait fait couler
Tout le sang des tyrans qui voulaient l’immoler.

LE JEUNE ARZÉMON

Il suffit ; je me jette à tes pieds que j’embrasse
À ton cher frère, à toi, je demande une grâce,
C’est d’épuiser sur moi les plus affreux tourments
Que la vengeance ajoute à la mort des méchants ;
Je les ai mérités : ton courroux légitime
Ne saurait égaler mes remords et mon crime.

CÉSÈNE

Soldats qui l’entendez, je le laisse en vos mains :
Soyons justes, amis, et non pas inhumains ;
Sa mort doit me suffire.

ARZAME

Eh bien ! Il la mérite :
Mais joignez-y sa sœur, elle est déjà proscrite.
La vie en tous les temps ne me fut qu’un fardeau,
Qu’il me faut rejeter dans la nuit du tombeau ;
Je suis sa sœur, sa femme, et cette mort m’est due.