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AVERTISSEMENT

POUR LA PRÉSENTE ÉDITION.


Voltaire, dans ses Mélanges littéraires, a raconté l’anecdote qui fait le sujet de cette comédie avec plus de détails qu’il ne le fait dans la préface ci-après : « Lorsque M. de Gourville, qui fut nommé vingt-quatre heures pour succéder à Colbert et que nous avons vu mourir l’un des hommes de France le plus considéré ; lors, dis-je, que ce M. de Gourville, craignant d’être pendu en personne comme il le fut en effigie, s’enfuit de France en 1661, il laissa deux cassettes pleines d’argent, l’une à Mlle de Lenclos, l’autre à un faux dévot. A son retour, il trouva chez Ninon sa cassette en fort bon état ; il y avait même plus d’argent qu’il n’en avait laissé, parce que les espèces avaient augmenté depuis ce temps-là. Il prétendit qu’au moins le surplus appartenait de droit à la dépositaire ; elle ne lui répondit qu’en le menaçant de faire jeter la cassette par les fenêtres. Le dévot s’y prit d’une autre façon, il dit qu’il avait employé son dépôt en œuvres pies, et qu’il avait préféré le salut de l’âme de Gourville à un argent qui sûrement l’aurait damné. »

Il ne faudrait pas sans doute se porter garant de la parfaite exactitude de tous ces détails. Mais il y avait certainement quelque vérité dans le fond de l’anecdote. Saint-Évremond écrit à Ninon de Lenclos elle-même : « Car enfin, ma belle gardeuse de cassette, la réputation de votre probité est particulièrement établie sur ce que vous avez résisté à des amants qui se fussent accommodés volontiers de l’argent de vos amis…

Dans un couvent, en sœur dépositaire,
Vous auriez bien ménagé quelque affaire ;
Et dans le monde, à garder les dépôts,
On vous eût justement préférée aux dévots. »

(Les Véritables Oeuvres de M. de Saint-Évremont, Londres, 1707, tome II, pages 395-396.)