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aimable en danger, pour uno j^rando passion malliouronso : mais s’il n’est rien de neuf dans ces peintures, les auteurs alors oui le malheur de n’être regardés que comme des imitateurs. La place de Campistron 1 est triste ; le lecteur dit : Je connaissais tout cela, et je l'avais vu bien mieux exprimé.

Pour donner au public un peu de ce neuf qu’il demande toujours, et que bientôt il sera impossible de trouver, un amateur du théàtre a été forcé de mettre sur la scène l’ancienne chevalerie, le contraste des mahométans et des chrétiens, celui des Américains et des Espagnols, celui des Chinois et des Tartares-. Il a été forcé de joindre à des passions si souvent traitées des mœurs que nous ne connaissions pas sur la scène.

On hasarde aujourd’hui le tableau contrasté des anciens Scythes et des anciens Persans, qui peut-être est la peinture de quelques nations modernes. C’est une entreprise un peu témé- raire d’introduire des pasteurs, des laboureurs, avec des princes, et de mêler les mœurs champêtres avec celles des cours. Mais enfin cette invention théâtrale (heureuse ou non) est puisée entièrement dans la nature. On ])eut même rendre héroïque cette nature si simple ; on peut faire parler des pâtres guerriers et libres avec une fierté qui s’élève au-dessus de la bassesse que nous attril)uons très-injustement à leur état, pourvu que cette fierté ne soit jamais boursouflée ; car qui doit fôtre ? Le boursouflé, l’ampoulé ne convient pas même à César. Toute grandeur doit être simple.

C’est ici, en quelque sorte, l’état de nature mis en opposition avec l’état de fhomme artificiel, tel qu’il est dans les grandes villes. On peut enfin étaler dans des cabanes des sentiments aussi touchants que dans des palais.

On avait souvent traité en burlesque cette opposition si frappante des citoyens des grandes villes avec les hal)itants des campagnes ; tant le burlesque est aisé, tant les choses se présentent eu ridicule à certaines nations.

On trouve beaucoup de peintres qui réussissent dans le grotesque, et peu dans le grand. Un homme de beaucoup d’esprit, et qui a un nom dans la littérature, s’étant fait expliquer le sujet d'Alzire, qui n’avait pas encore été représentée, dit à celui qui lui exposait ce plan : « J’entends, c’est Arlequin sauvage. »

Il est certain qu’Alzire n’aurait pas réussi, si l’effet théâtral

1. Imitateur de Racine. (G. A.)

2. Tancrède. — Zaïre. — Alzire. — L’Orphelin de la Chine.