26 CORRESPONDANCli.
5 juin 177G.
Je vous supplie, mon vrai philosophe, de me dire quis, quid, ubi, quibus auxiliis, cur ; je ne sais que quomodo et quando[2]. Vous et moi, nous sommes bien affligés, et une de mes douleurs est de mourir sans vous voir.
Écrivez-moi, je vous en conjure, par votre digne ami M. de Vaines.
Le vieux malade de F V,
5 juin.
Je suis presque consolé, monsieur ; on vous rend justice, et vous pouvez dire : Uno avulso, non déficit alter. Il y a quelque temps que je pris la liberté d’écrire à monsieur le grand chancelier d’Angleterre pour un procès assez considérable qu’un homme de ma colonie est obligé de poursuivre à Londres. Je fus très étonné de recevoir deux lettres consécutives de M. le grand chancelier, contre-signées Turgot. Je demandai à M. Dupont l’éclaircissement de cette aventure. Je n’ai point eu de réponse. Oserai-je vous supplier de vouloir bien en faire souvenir M. Dupont, si vous le voyez.
Je suis enchanté que vous conserviez votre place, et que M. Turgot conserve sa philosophie. II a ou la bonté de m’écrire une lettre dans laquelle j’ai reconnu toute sa belle âme. Le triomphe de M. de La Harpe contribue aussi beaucoup à ma consolation ; mais je m’afflige avec M. d'Alembert, et je crains que M. le marquis de Condorcet ne soit trop en colère. On m’assure que votre esprit conciliant vous a attiré tous les cœurs, comme votre probité a subjugué tous les esprits. Mon cœur et mon esprit se mêlent dans la foule.
Je ne sais où est M. de Concorcet ; mais permettez-moi de mettre ce petit billet dans votre paquet.
Conservez-moi vos bontés ; elles sont chères au vieux malade de Ferney.