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ANNÉE 1776. H

9756. — A M. DE VAINES

3 mai.

Puisque vous daignez, monsieur, admettre dans votre bibliothèque des facéties chinoises[1], indiennes et tartares, j’ai l’honneur de vous en envoyer un exemplaire ; mais je viens de lire une brochure qui me dégoûte de toutes les autres. C’est un édit sur la liberté du commerce des vins. Il fait un beau pendant avec l'édit du 14 septembre[2] en faveur des blés.

Je conçois qu’il y ait des gens tout étonnés de voir des traités de politique et de morale avec la formule Car tel est notre bon plaisir, mais je ne conçois pas que des gens qui ont de la barbe au menton s’effarouchent des vérités qu’on leur démontre. Il me semble que je vois les médecins du temps de Molière soutenir des thèses contre la circulation du sang. Il est impossible que le parti de ceux qui ferment les yeux à la lumière se soutienne longtemps. Toutes les nouvelles vérités sont d’abord mal reçues chez nous. On est fâché d’être obligé de retourner à l’école, quand on se croit docteur.

Et quæ Imberbes didicere, senes perdenda fateri[3].

Enfin, monsieur, ces vins me paraissent avoir une sève et une force toute nouvelle. Je conseille à Messieurs[4] d’en boire largement, au lieu d’en dire du mal. Ces bons vins de M. Turgot sont capables de me ranimer. Mon malheur est de n’avoir pas longtemps à en boire.

9757. — A M. LAUS DE BOISSY,

sur sa réception a l'académie des arcades de rome

A Ferney, 6 mai.

Si j’ai l’honneur, monsieur, d’être votre confrère à Rome, je ne serais pas moins flatté de l’être à Paris : j’ambitionne encore un titre plus flatteur, celui de votre ami ; vos lettres m’en ont inspiré le désir autant que vos ouvrages ont de droit à mon

  1. Lettres chinoises, indiennes et tartares ; voyez tome XXIX, page 451.
  2. Voyez page 6.
  3. Horace, livre II, épitre i, vers 84-85.
  4. Nom que l'on donnait aux conseillers au parlement.