Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome50.djvu/174

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

vains travaux d’un homme de lettres. Je me suis mis enfin à bâtir des maisons, afin de faire quelque chose de solide ; mais les principaux fondements de ma colonie sont vos conseils et vos bontés.

Quoique la crainte des impôts m’ait ôté quelques habitants, il m’en revient d’autres plus utiles et plus considérables ; c’est à votre sage administration principalement que je les dois : je dois commencer cette année par des remerciements. Recevez, avec votre bienveillance ordinaire, les assurances de la respectueuse amitié avec laquelle j’ai l’honneur d’être, etc.

Voltaire.     

9925. — À M. DE BACQUENCOURT[1].

1er janvier 1777.     


Monsieur, depuis la journée des Calas, je vous ai bien des obligations. La plus grande est celle d’être notre intendant. Je vous remercie surtout de m’avoir instruit sur la petite patrie[2] que je me suis choisie je ne sais comment, et que je connais très-peu.

Il me semble qu’on disputait sans beaucoup s’entendre. Ceux qui accusaient votre subdélégué de prendre secrètement le parti de son commis et de Rose[3] m’ont paru injustes. Ceux qui ont accusé nos états de vouloir prendre pour eux le marché de Rose ne m’ont pas paru plus équitables. Ce que j’ai pu comprendre dans ma solitude, au milieu de mes souffrances continuelles, c’est que tout le monde avait raison en un seul point, celui de s’en rapporter à votre justice et à votre bonté.

Vous savez, monsieur, par expérience, qu’on va toujours trop loin, soit quand on soutient ses droits, soit quand on attaque ceux d’autrui. On vous avait d’abord mandé que la colonie de Ferney ne voulait payer aucune taxe, et vous avez bientôt reconnu qu’elle offrait de se taxer elle-même. On avait persuadé le conseil que l’industrie, dans le pays de Gex, produisait plus que la culture des terres ; et il s’est trouvé à l’examen que l’industrie, laquelle réside presque tout entière dans Ferney, ne rapporte pas la dixième partie des biens-fonds.


  1. Dupleix de Bacquencourt, intendant de Bourgogne. Voyez une note de la lettre 9909.
  2. Ferney ; voyez lettre 9854.
  3. Voyez lettre 9913.