Scène VI.
Mon père, faudra-t-il trembler tous les jours pour votre vie, pour celle de mes frères, et essuyer les infidélités de mon mari ?
Votre frère et votre mari sont des rebelles : comment ! manger du miel un jour de bataille ! Il est bien heureux que l’armée ait pris son parti ; mais votre mari est cent fois plus méchant que lui ; je jure que je le traiterai comme Samuel a traité Agag.
Ah ! madame, comme il roule les yeux, comme il grince les dents ! fuyons au plus vite ; votre père est fou, ou je me trompe.
Il est quelquefois possédé du diable[1].
Ma fille, qui est cette drôlesse-là ?
C’est une des femmes de votre gendre David, que vous avez autrefois tant aimé.
Elle est assez jolie : je la prendrai pour moi, au sortir de la bataille.
Ah ! le méchant homme ! On voit bien qu’il est réprouvé.
Mon père, je vois que votre mal vous prend ; si David était ici, il vous jouerait de la harpe[2] ; car vous savez que la harpe est un spécifique contre les vapeurs hypocondriaques.
Taisez-vous, vous êtes une sotte ; je sais mieux que vous ce que j’ai à faire.
Ah ! madame, comme il est méchant ! Il est plus fou que jamais ; retirons-nous au plus vite.