Scène II.
Mon cher, mon tendre époux, maître de mon cœur et de ma vie, venez, sortez avec moi de ces lieux dangereux ; Saül arme contre vous, et Akis vous attend[1].
Qu’entends-je ? son époux ? Quoi ! monstre de perfidie, vous me jurez un amour éternel, et vous avez pris une autre femme ! Quelle est donc cette insolente rivale ?
Je suis confondu.
Auguste et aimable fille d’un grand roi, ne vous mettez pas en colère contre votre servante : un héros tel que David a besoin de plusieurs femmes ; et moi, je suis une jeune veuve qui ai besoin d’un mari : vous êtes obligée d’être toujours auprès du roi votre père ; il faut que David ait une compagne dans ses voyages et dans ses travaux ; ne m’enviez pas cet honneur, je vous serai toujours soumise.
Elle est civile et accorte du moins : elle n’est pas comme ces concubines impertinentes qui vont toujours bravant la maîtresse de la maison : monstre, où as-tu fait cette acquisition ?
Puisqu’il faut vous dire la vérité, ma chère Michol, j’étais à la tête de mes brigands[2], et, usant du droit de la guerre, j’ordonnai à Nabal, mari d’Abigaïl, de m’apporter tout ce qu’il avait ; Nabal était un brutal[3] qui ne savait pas les usages du monde, il me refusa insolemment : Abigaïl est née douce, honnête et tendre[4] ; elle vola tout ce qu’elle put à son mari pour me l’apporter : au bout de huit jours le brutal mourut[5]