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ACTE V, SCÈNE VI. 561

Ce n’est qu’en le perdant que j’ai pu lui parler ! Ah, Tancrède !

TANCRÈDE,

Vos pleurs devraient me consoler ; Mais il faut vous quitter, ma mort est douloureuse ! Je sens qu’elle s’approche. Argire, écoutez-moi : Voilà le digne objet qui me donna sa foi ; Voilà de nos soupçons la victime innocente ; À sa tremblante main joignez ma main sanglante ; Que j’emporte au tombeau le nom de son époux. Soyez mon père.

ARGIRE, prenant leurs mains.

Hélas ! mon cher fils, puissiez-vous Vivre encore adoré d’une épouse chérie !

TAVCRÈDE.

J’ai vécu pour venger ma femme et ma patrie ; J’expire entre leurs bras, digne de toutes deux. De toutes deux aimé… j’ai rempli tous mes vœux… Ma chère Aménaïde !..,

AMÉNAÏDE.

Eh bien !

TAXCRt ; DE.

Gardez de suivre €e malheureux amant… et jurez-moi de vivre…

(Il retombe.) CATANE.

Il expire… et nos cœurs de regrets pénétrés… Qui l’ont connu trop tard…

AMÉNAÏDE, se jetant sur le corps de Tancrède.

Il meurt, et vous pleurez… Vous, cruels, vous, tyrans, qui lui coûtez la vie !

(Elle se relève et marche.)

Que l’enfer engloutisse, et vous, et ma patrie. Et ce sénat barbare, et ces horribles droits D’égorger l’innocence avec le fer des lois ! Que ne puis-je expirer dans Syracuse en poudre. Sur vos corps tout sanglants écrasés par la foudre !

(Elle se rejette sur le corps de Tancrède.)

Tancrède ! cher Tancrède !

(Elle se relève en fureur.)

Il meurt, et vous vivez ! Vous vivez !.., je le suis… je l’entends, il m’appelle…

V. — Théathe. IV. 36