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ACTE II, SCÈNE I. 517

Qu’il apprenne de moi sa perte et mon supplice ; Qu’il hâte son retour et défende ses droits. Pour venger un héros je fais ce que je dois. Ah ! si je le pouvais, j’en ferais davantage. J’aime, je crains un père, et respecte son âge ; Mais je voudrais armer nos peuples soulevés Contre cet Orhassan qui nous a captivés. D’un brave chevalier sa conduite est indigne : Intéressé, cruel, il prétend à l’honneur ! Il croit d’un peuple libre être le protecteur ! Il ordonne ma honte, et mon père la signe ! Et je dois la subir, et je dois me livrer Au maître impérieux qui pense m’honorer ! Hélas ! dans Syracuse on hait la tyrannie ; Mais la plus exécrable, et la plus impunie. Est celle qui commande et la haine et l’amour. Et qui veut nous forcer de changer en un jour. Le sort en est jeté.

FANIE.

Vous aviez’paru craindre.

AMÉNAÏDE.

Je ne crains plus.

FANIE.

On dit qu’un arrêt redouté Contre Tancrède même est aujourd’hui porté : Il y va de la vie à qui le veut enfreindre.

AMÉNAÏDE.

Je le sais ; mon esprit en fut épouvanté : Mais l’amour est bien faible alors qu’il est timide. J’adore, tu le sais, un héros intrépide ; Comme lui je dois l’être.

FAME.

Une loi de rigueur Contre vous, après tout, serait-elle écoutée ? Pour effrayer le peuple elle parait dictée.

AMÉNAÏDE.

Elle attaque Tancrède, elle me fait horreur. Que cette loi jalouse est digne de nos maîtres ! Ce n’était point ainsi que ses braves ancêtres. Ces généreux Français, ces illustres vainqueurs. Subjuguaient l’Italie, et conquéraient des cœurs. On aimait leur franchise, on redoutait leurs armes ;