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LADY ALTON.

Après une promesse de mariage ! scélérat ! après m’avoir juré tant d’amour !

LORD MURRAY.

Quand je vous ai juré de l’amour, j’en avais ; quand je vous ai promis de vous épouser, je voulais tenir ma parole.

LADY ALTON.

Eh ! qui t’a empêché de tenir ta parole, parjure ?

LORD MURRAY.

Votre caractère, vos emportements : je me mariais pour être heureux, et j’ai vu que nous ne l’aurions été ni l’un ni l’autre.

LADY ALTON.

Tu me quittes pour une vagabonde, pour une aventurière.

LORD MURRAY.

Je vous quitte pour la vertu, pour la douceur, et pour les grâces.

LADY ALTON.

Traître ! tu n’es pas où tu crois en être ; je me vengerai plus tôt que tu ne penses.

LORD MURRAY.

Je sais que vous êtes vindicative, envieuse plutôt que jalouse, emportée plutôt que tendre : mais vous serez forcée à respecter celle que j’aime.

LADY ALTON.

Allez, lâche, je connais l’objet de vos amours mieux que vous ; je sais qui elle est ; je sais qui est l’étranger arrivé aujourd’hui pour elle ; je sais tout : des hommes plus puissants que vous sont instruits de tout ; et bientôt on vous enlèvera l’indigne objet pour qui vous m’avez méprisée.

LORD MURRAY.

Que veut-elle dire, Polly ? elle me fait mourir d’inquiétude.

POLLY.

Et moi, de peur. Nous sommes perdus.

LORD MURRAY.

Ah ! madame, arrêtez-vous ; un mot ; expliquez-vous, écoutez…

LADY ALTON.

Je n’écoute point, je ne réponds rien, je ne m’explique point. Vous êtes, comme je vous l’ai déjà dit, un inconstant, un volage, un cœur faux, un traître, un perfide, un homme abominable.

(Elle sort.)