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avez fait du bien : tenez, voilà pour le bien que vous avez fait ; mais si vous avisez jamais de prononcer le nom de cet homme et de Mlle  Lindane, je vous ferai jeter par les fenêtres de votre grenier. Allez.

FRÉLON.

Grand merci, monseigneur. Tout le monde me dit des injures, et me donne de l’argent : je suis bien plus habile que je ne croyais[1].



Scène III.


lord MURRAY, POLLY.
LORD MURRAY, seul un moment.

un vieux gentilhomme arrivé d’Écosse, Lindane née dans le même pays ! Hélas ! s’il était possible que je pusse reparer les torts de mon père ! si le ciel permettait…! Entrons. (À Polly, qui sort de la chambre de Lindane) Chère Polly, n’es-tu pas bien étonnée que j’aie passé tant de temps sans venir ici ? deux jours entiers !… je ne me le pardonnerais jamais, si je ne les avais employés pour la respectable fille de milord Monrose : les ministres étaient à Windsor ; il a fallu y courir. Va, le ciel t’inspira bien quand tu te rendis à mes prières, et que tu m’appris le secret de sa naissance.

POLLY.

J’en tremble encore ; ma maîtresse me l’avait tant défendu ! Si je lui donnais le moindre chagrin, je mourrais de douleur. Hélas ! votre abscence lui a causé aujourd’hui un assez long évanouissement, et je ne sais comment j’ai eu assez de forces pour la secourir.

LORD MURRAY.

Tiens, voilà pour le service que tu lui as rendu.

POLLY.

Milord, j’accepte vos dons : je ne suis pas si fière que la belle Lindane, qui n’accepte rien, et qui feint d’être à son aise, quand elle est dans la plus extrême indigence.

LORD MURRAY.

Juste ciel ! la fille de Monrose dans la pauvreté ! malheureux que je suis ! que m’as-tu dit ? combien je suis coupable ! que je

  1. Ici finit le rôle de Frélon. Voltaire ne voulut pas lui donner plus d’importance afin de pouvoir faire accepter la pièce pour une traduction anglaise. (G. A.)