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PRÉFACE[1]



La comédie dont nous présentons la traduction aux amateurs de la littérature est de M. Hume[2], pasteur de l’église d’Édimbourg, déjà connu par deux belles tragédies jouées à Londres : il est parent[3] et ami de ce célèbre philosophe M. Hume, qui a creusé avec tant de hardiesse et de sagacité les fondements de la métaphysique et de la morale. Ces deux philosophes font également honneur à l’Écosse, leur patrie.

La comédie intitulée l’Écossaise nous parut un de ces ouvrages qui peuvent réussir dans toutes les langues, parce que l’auteur peint la nature, qui est partout la même : il a la naïveté et la vérité de l’estimable Goldoni[4], avec peut-être plus d’intrigue, de force, et d’intérêt. Le dénoûment, le caractère de l’héroïne, et celui de Freeport, ne ressemblent à rien de ce que nous connaissons sur les théâtres de France ; et cependant c’est la nature pure. Cette pièce paraît un peu dans le goût de ces romans anglais qui ont fait tant de fortune ; ce sont des touches semblables, la même peinture des mœurs, rien de recherché, nulle envie d’avoir de l’esprit, et de montrer misérablement l’auteur quand on ne doit montrer que les personnages ; rien d’étranger au sujet ; point de tirade d’écolier, de ces maximes triviales qui remplissent le vide de l’action : c’est une justice que nous sommes obligé de rendre à notre célèbre auteur.

Nous avouons en même temps que nous avons cru, par le

  1. Cette préface est en tête de la première édition. Elle est de Voltaire, ainsi que les deux autres écrits qui la suivent immédiatement, et que la dédicace qui la précède. Voyez l’Avertissement de Beuchot.
  2. On sent bien que c’était une plaisanterie d’attribuer cette pièce à M. Hume. (Note de Voltaire. 1761.)
  3. Dans la première édition, on lisait : Il est le frère de ce célèbre. (B.)
  4. Lessing prétend que Voltaire a imité, dans l’Écossaise, le Café de Goldoni. Il ajoute que le caractère de Frélon est calqué sur celui de Marzio. Que Voltaire se soit inspiré de Goldoni, c’est croyable ; mais quant au caractère de Frélon, il est bien original, car il l’avait déjà esquissé dans l’Envieux vers 1738. (G. A.)