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À MO-SEIGNEUR

LE 3IARÉCHAL DUC DE RICHELIEU

PAIR DE FRANCE,

PREMIER GENTILHOMME DE LA CHAMBRE DU ROI, COMMANDANT EN LANGUEDOC,

l’un des (QUARANTE DE l’aCADÉMIE.

Je voudrais, monseigneur, vous présenter de beau marbre comme les Génois ’, et je n’ai que des figures chinoises à vous offrir. Ce petit ouvrage ne paraît pas fait pour vous ; il n’y a aucun héros dans cette pièce qui ait réuni tous les suffrages par les agréments de son esprit, ni qui ait soutenu une république prête à succomber, ni qui ait imaginé de renverser une colonne anglaise avec quatre canons. Je sens mieux que personne le peu ([ue je vous offre ; mais tout se pardonne à un attachement de <|uarante années. On dira peut-être qu’au pied des Alpes, et vis- à-vis des neiges éternelles, où je me suis retiré, et où je devais n’être que philosophe, j’ai succombé à la vanité d’imprimer que ce qu’il y a eu de plus brillant sur les bords de la Seine ne m’a jamais oublié. Cependant je n’ai consulté que mon cœur ; il me conduit seul ; il a toujours inspiré mes actions et mes paroles : il se trompe quelquefois, vous le savez ; mais ce n’est pas après (les épreuves si longues. Permettez donc que, si cette faible tragédie peut durer quelque temps après moi, on sache que l’auteur ne vous a pas été indifférent ; permettez qu’on apprenne que, si votre oncle fonda les beaux-arts en France, vous les avez soutenus dans leur décadence.

L’idée de cette tragédie me vint, il y a quelque temps, à la lecture de VOrphelin de Tchao, tragédie chinoise, traduite par le

1. Les Génois avaient érige une statue à Richelieu pour sa défense de leur ville ■n 1747. (B.)