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Il faut employer tout, jusqu’à Cicéron même,
Ce César que je crains, mon épouse que j’aime :
Sa docile tendresse, en cet affreux moment,
De mes sanglants projets est l’aveugle instrument.
Tout ce qui m’appartient doit être mon complice.
Je veux que l’amour même à mon ordre obéisse.
Titres chers et sacrés, et de père, et d’époux,
Faiblesses des humains, évanouissez-vous[1].



Scène 2

Catilina, Céthégus ; affranchis et soldats dans le lointain


CATILINA.

Eh bien ! cher Céthégus, tandis que la nuit sombre
Cache encor nos desseins et Rome, dans son ombre,
Avez-vous réuni les chefs des conjurés ?

CETHEGUS.

Ils viendront dans ces lieux du consul ignorés,
Sous ce portique même, et près du temple impie
Où domine un sénat, tyran de l’Italie.
Ils ont renouvelé leurs serments et leur foi.
Mais tout est-il prévu ? César est-il à toi ?
Seconde-t-il enfin Catilina qu’il aime ?

CATILINA.

Cet esprit dangereux n’agit que pour lui-même.

CETHEGUS.

Conspirer sans César !

CATILINA.

Ah ! je l’y veux forcer.
Dans ce piège sanglant je veux l’embarrasser.
Mes soldats, en son nom, vont surprendre Préneste ;
Je sais qu’on le soupçonne, et je réponds du reste.
Ce consul violent va bientôt l’accuser ;
Pour se venger de lui, César peut tout oser.

  1. Il existe une variante de ce vers :
    L'ambition l'emporte, evanouissez-vous.



    Corneille a dit dans Rodogune. acte II, scène Ire :
    Vains fantômes d'Ètat, évanouissez-vous.