SUR L’ÉLECTIF DE SOPHOCLE. -175
d’un poëte fort postérieur. On sait que les savants do la célèbre école d’Alexandrie ont non-seulement rectifié et corrigé, mais aussi altéré et supposé plusieurs poëmes anciens. Electre était peut-être mutilée ou perdue de leur temps ; ils en auront lié tous les fragments pour en faire un(! pièce suivie. Quoi qu’il en soit, on y retrouve les fameux vers cités par IMularque (dans la vie de Lysandre), qui préservèrent Athènes d’une destruction totale lorsque Lysandre s’en rendit le maître. En effet, comme les vainqueurs délibéraient le soir dans un festin s’ils raseraient seulement les murailles de la ville, ou s’ils la renverseraient de fond en comble, un Phocéen chanta ce beau chœur ; et tous les convives en furent si émus (ju’ils ne purent se résoudre \\ détruire une ville qui avait produit d’aussi beaux esprits, et d’aussi grands personnages.
Dans Euripide, Electre a été mariée par Égisthe à un homme sans bien et sans dignité, qui demeure hors de la ville, dans une maison conforme à sa fortune. La scène est devant cette maison ; ce qui ne produit pas une décoration bien magnifique. Cet époux d’Electre, qui, à la vérité, par respect, n’a eu aucun commerce avec elle, ouvre la scène, en fait l’exposition dans un long monologue, qu’on peut regarder comme un prologue. Ce défaut, qui se trouve dans presque toutes les premières scènes d’Euripide, rend ses expositions la plupart froides et peu liées avec la pièce.
Oreste est reconnu par un vieillard, en présence de sa sœur, j)ar une cicatrice qu’il s’est faite au-dessus du sourcil, en courant, lorsqu’il était enfant, après un chevreuiU
Des critiques ont trouvé cette reconnaissance trop brusque, et celle de Sophocle trop traînante. Il semble qu’ils n’aient fait aucune attention aux mœurs de la nation grecque, et ([u’ils n’aient connu ni le génie ni les grâces des deux tragiques.
Oreste va ensuite avec son ami Pylade assassiner Égisthe par derrière, pendant qu’il est penché pour considérer les entrailles d’une victime ; ils le tuent au milieu d’un sacrifice et d’une cérémonie religieuse, parce que tous les droits divins et humains avaient été violés dans l’assassinat d’Agamemnon. commis dans son propre palais, par une ruse abominable, et lorsqu’il allait se mettre à table et faire des libations aux dieux. Ainsi ce récit de la mort d’Égisthe contient la description d’un sacrifice. Les Grecs étaient fort curieux de ces descriptions de sacrifices, de fêtes, de jeux, etc., ainsi que des marques, cicatrices, anneaux, bijoux, cassettes, et autres choses qui amènent les reconnaissances.
Le récit qu’Electre et son frère font de la manière dont ils ont assassiné leur mère, qui ne vient sur la scène que pour y être tuée, me paraît beaucoup plus atroce que la scène de Sophocle, que j’ai rapportée ci-dessus. Oreste est livré aux furies, pour avoir exécuté l’ordre des dieux, pendant qu’Electre, qui se vante d’avoir vu cet horrible spectacle, d’avoir encouragé son frère, d’avoir conduit sa main, parce (pi’Oreste s’était couvert le visage
\. Dans l’édition de H.’JO on lit : après un chevreuil. Il va ensuite avec
son ami Pylade, etc. « Le changement est de 1757. (B.)