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J’admire les gens qui m’attribuent cette épître : ils m’imputent de m’être donné des louanges qui sont pardonnables à l’amitié de M. de Schovalo, mais qui seraient assurément très-ridicules dans ma bouche.

J’ai lu par hasard des nouvelles à la main, no 25, dont l’auteur prétend que je me suis caché[1] sous le nom de M. de Schovalo ; il pourrait dire aussi que je me cache tous les jours sous le nom du roi de Prusse, qui fait des choses non moins étonnantes en notre langue, et sous celui de l’impératrice de Russie, qui écrit en prose comme son chambellan en vers. Les fadaises insipides dont tant de petits Welches nous inondent, croyant être de vrais Français, sont bien loin d’égaler les chefs-d’œuvre étrangers dont je vous parle ; c’est que ces petits Welches n’ont que des mots dans la tête, et que ces génies du Nord pensent solidement.

J’emploie le double W pour les Welches : il faut être barbare avec eux.

Les minces écrivains de nouvelles et d’inutilités m’imputent une Lettre d’un Ecclésiastique sur les jésuites, et je ne sais quel Taureau blanc[2]. Je vous assure que je ne me mêle point des jésuites ; je suis comme le pape, je les ai pour jamais abandonnés, excepté Père Adam, que j’ai toujours chez moi. À l’égard des taureaux blancs ou noirs, je m’en tiens à ceux que j’élève dans mes étables et avec lesquels je laboure. Il y a soixante ans que je suis un peu vexé, et je m’en console dans ma chaumière, pratiquant quid faciat lætas segetes[3]. J’ai surtout lætum animum, malgré la cabale qui croit m’affliger, et dont je me moquerai tant que j’aurai un souffle de vie, etc.

9046. — À M. RIBOTTE,
à montauban[4].
4 février.

L’octogénaire de Ferney, monsieur, est comme vous très-malade, et ne se rétablira pas comme vous ; il est au milieu des neiges dans sa solitude. Il n’a pas entendu dire un seul mot des sacrements de baptême et de mariage dont vous lui parlez. Il ne

  1. On le répète dans les Mémoires secrets, du 23 mars 9069.
  2. Voltaire avoue ces ouvrages dans la lettre 6706.
  3. Virgile, Géorgiques, I, i.
  4. Bulletin de la Société de l’histoire du Protestantisme français ; Paris, 1856, Page 219.