Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome48.djvu/543

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Silistrie est prise. Il ajoute que le grand vizir s’est enfui à Andrinople avec le grand étendard de Mahomet.

Je suppose qu’un roi n’est jamais trompé quand il écrit des nouvelles ; et, dans cette supposition, je suis près de mourir de joie, au lieu de mourir de vieillesse, comme on me l’annonçait tout à l’heure avant que je reçusse la lettre du roi de Prusse.

Mort ou vif, il est bien fâcheux d’être si loin des merveilles de votre règne, et M. Diderot est un heureux homme ; mais aussi il mérite son bonheur. Pour moi, j’expire dans le désespoir de n’avoir pu voir mon héroïne, qui sera celle du monde entier, et de n’avoir pu lui présenter mon très-profond et très-inutile respect.

9014. — À M. MARIN[1].
30 décembre.

En voici bien d’une autre ! l’affaire de M. de Goezmann tourne assez mal ; mais je suis toujours pour ce que j’en ai dit. Il ne me paraît pas possible que vous soyez le moins du monde inquiété pour cette tracasserie. Beaumarchais a plus d’esprit que le Bedlam de Londres et les Petites-Maisons de Paris réunis. Il faut qu’il ait eu le diable au corps de vous mêler dans ce procès, auquel vous êtes si étranger. Il n’avait qu’à s’en tenir à certaine minute de Le Jay, corrigée de la main de M. Goezmann. Il semble qu’il cherche des ennemis, et qu’il aime à se battre seul contre une armée. Je me flatte que cette maudite affaire n’altère point votre tranquillité.

Je vous prie, mon cher monsieur, de vouloir bien avoir la bonté de faire parvenir l’incluse à M. de La Harpe ; il est plus à plaindre que tous ceux qui ont des procès, car il n’a pas de quoi en avoir un.

Je vous supplie de vouloir bien me mander le résultat de la tracasserie que Beaumarchais vous a faite ; il vous doit assurément une réparation.

9015. — À M. LE COMTE D’ARGENTAL.
30 décembre.

Mon cher ange, votre lettre du 19 décembre me confirme dans les soupçons que j’avais depuis longtemps. Je n’ai point reçu

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.