prends son parti que parce que je suis attaché mille fois davantage à la vérité. Je ne vous sollicite point ; je vous dis seulement : Voyez, je m’en rapporte à vous.
Si on pouvait espérer de ramener d’Hornoy à ses vrais intérêts, je me joindrais à vous ; je ferais le voyage, tout mourant que je suis. On pourrait lui procurer un établissement bien honorable ; mais je vous embrasse de tout mon cœur.
Je reçois de vous, monsieur, deux beaux présents à la fois ; il est vrai que je les reçois tard. C’est la cinquième édition du très-beau poëme des Saisons, avec une de vos lettres ; elle est du 12 de mai, et nous sommes au mois de septembre. Le paquet est resté environ quatre mois à Lyon dans les mains des commis. Le poëme des Saisons ne restera jamais si longtemps chez les libraires.
Je trouve à l’ouverture du livre, page 104 :
J’entends de loin les cris d’un peuple infortuné
Qui court le thyrse en main, de pampre couronné, etc.
Les premières éditions portaient d’un peuple fortuné. Vous seriez-vous ravisé cette fois-ci ? voudriez-vous dire qu’un peuple infortuné, chargé de corvées et d’impôts, ne laisse pas pourtant de s’enivrer, de danser et de rire ? Cette seconde leçon vaudrait bien la première ; mais, en ce cas, il eut fallu exprimer que la vendange fait oublier la misère, et addit cornua pauperi : j’aime mieux croire que c’est une faute d’impression[1].
J’ignore si vous avez reçu les Lois de Minos. Vous vous doutez bien dans quel esprit j’ai fait cette rapsodie ; il ne faut jamais perdre de vue le grand objet de rendre la superstition exécrable. J’aurais dû y mettre un peu plus de vim tragicam[2] : mais un malade de quatre-vingts ans ne peut rien faire de ce qu’il voudrait en aucun genre.