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année 1772.

marrons[1] ont été reçus, et Bertrand les a distribués à tous les Bertrands ses confrères dignes de les manger. Tous pensent unanimement que Raton a rendu un précieux service à la cause commune des Bertrands et des Ratons ; mais que Raton n’a rien à craindre pour ses pattes, et qu’il n’y a pas de quoi fouetter un chat dans la petite espièglerie qu’il vient de faire. Les pauvres rats d’église pourront être un peu mécontents, mais cette fois-ci ils n’oseront pas trop sortir de leurs trous ; il n’y aurait que des coups à gagner pour eux.

Pour remercier Raton de ses bons marrons, Bertrand ne lui renvoie que des marrons d’Inde. Il est impatient de savoir comment Catau aura trouvé le dernier marron[2] du 31 décembre. Raton devrait bien écrire à Catau que ce marron est meilleur à manger qu’elle ne croit, et que, si elle y faisait honneur, tous les Ratons et les Bertrands feraient pour elle des tours et des gambades. Bertrand et ses confrères embrassent et remercient Raton-Belleguier de tout leur cœur.

N. B. Bertrand répète à Raton que le secret sur les marrons d’Inde est nécessaire jusqu’à ce que l’on sache comment les marrons d’Inde du 31 décembre auront été accueillis par Catau. Il le prévient aussi que personne, excepté Raton-Belleguier, n’a de copie de ce qu’il lui envoie, et il prie Raton de la garder pour lui seul, mais tout seul.

8760. — À M. IMBERT[3].
À Ferney, 5 février.

Vous avez bien voulu, monsieur, m’écrire quelquefois ; je m’adresse à vous dans une occasion où je crains de fatiguer monsieur le chancelier et M. de Sartines, occupés tous deux de plus grandes affaires que de celles d’un libraire. J’ai déjà porté mes justes plaintes à M. de Sartines de la contravention d’un nommé Valade, libraire de la rue Saint-Jacques, qui, sans approbation ni privilège, a imprimé et publié, sous le titre de Genève, les Lois de Minos entièrement défigurées. Il faut que quelque gagiste de la Comédie lui ait vendu clandestinement un mauvais manuscrit, auquel on aura cousu quelques vers pour grossir l’ouvrage. Le libraire Valade aura trompé le censeur royal et lui aura fait accroire que le manuscrit venait de moi.

Comme je n’ai presque aucun commerce avec Paris, je ne connais aucun censeur des livres. Je vous prie, monsieur, de vouloir bien m’indiquer celui à qui Valade a pu s’adresser, afin

  1. Le Discours de Me Belleguier, tome XXIX, page 7.
  2. La lettre dont il parle dans le No 8752.
  3. Éditeurs, de Cayrol et François.