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CORRESPONDANCE.

quelle voie ce paquet lui est parvenu. Il fait ses compliments à M. Desbans, qui se console avec les muses du chagrin de ne pouvoir plus faire la guerre. Il le remercie de l’honneur qu’il lui a fait. Le triste état où il est à présent ne lui permet pas de s’étendre autant qu’il le voudrait sur les sentiments de reconnaissance et d’estime dont il est pénétré pour M. Desbans, et dont il a l’honneur d’être le très-humble et très-obéissant serviteur. V.

8622. — À M. LE CARDINAL DE BERNIS.
Ferney, le 10 septembre.

En voici bien d’une autre, monseigneur ; il court une Lettre insolente, exécrable, abominable, d’un abbé Pinzo[1] au pape. Je n’ai jamais assurément entendu parler de cet abbé Pinzo ; mais des gens remplis de charité m’attribuent cette belle besogne. Cette calomnie est absurde ; mais il est bon de prévenir toute sorte de calomnie.

Je demande en grâce à Votre Éminence de vouloir bien me mander s’il y a en effet un abbé Pinzo. L’on m’assure qu’on a envoyé cette lettre au pape comme étant mon ouvrage. Je révère trop sa personne, et je l’estime trop, pour craindre un moment qu’il me soupçonne d’une telle sottise. Mais enfin, comme il se peut faire qu’une telle imposture prenne quelque crédit dans Rome chez des gens moins éclairés que Sa Sainteté, vous me pardonnerez de vous en prévenir, et même de joindre à cette lettre le témoignage de monsieur le résident de France à Genève.

Le dangereux métier d’homme de lettres expose souvent à de telles imputations. On dit qu’il faut prendre le bénéfice avec les charges ; mais ici le bénéfice est du vent, et les charges sont des épines.

Mon très-ancien, très-tendre, et très-respectueux attachement pour Votre Éminence me fait espérer qu’elle voudra bien m’ôter cette épine du pied, ou plutôt de la tête : elle est bien sûre de mon cœur.

  1. La lettre de l’abbé Pinzo est imprimée dans le recueil intitulé Évangile du jour, tome IX. ouvrage où se trouvent beaucoup de pièces attribuées à Voltaire.