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ANNÉE 1771.

nombre parmi vos livres ; ce n’est qu’un hommage que je mets à vos pieds.

Il paraît un ouvrage très-curieux et très-bien fait, intitulé l’Histoire critique de Jésus-Christ[1]. Il n’est pas difficile d’en avoir des exemplaires à Genève ; mais aussi il n’est pas aisé d’en faire passer en France. Dieu me préserve de servir à répandre cet ouvrage abominable, capable de dessécher toutes les semences de la religion chrétienne dans les consciences les plus timorées ! Je ne l’ai lu qu’avec une sainte horreur, et en faisant des signes de croix à chaque ligne.

Il paraît encore deux autres petits livres qui sont des canons de douze livres de balles, tandis que l’Histoire critique est une pièce de vingt-quatre. L’un est l’Examen des prophéties[2] ; et l’autre, l’Esprit du judaïsme[3]. On nous en fait craindre encore plusieurs autres de mois en mois. Belzebuth ne se lasse point de persécuter les fidèles. Nous touchons aux derniers temps, sans doute.

L’expulsion des jésuites annonce la fin du monde ; et nous allons voir incessamment paraître l’Antéchrist. Je me prépare pour cette grande révolution, puisque nous en avons déjà vu tant d’autres. En attendant, je vous embrasse le plus tendrement du monde, avec vénération et amour.

8106. — À M. LE MARQUIS DE THIBOUVILLE[4].
15 novembre.

Le vieux malade vous doit une réponse, mon cher marquis ; son état ne lui permet pas d’être le plus exact des correspondants. Il n’en est pas moins sensible. Vous aurez votre montre, que notre pauvre colonie a faite à très-bon marché, et qui est très-bonne. Vous aurez les Pelopides du jeune homme, qui ne sont pas bons, mais qui valent cent mille fois mieux que le Visigoth Atrée du barbare Crébillon. Mais il ne sait comment vous adresser le paquet. Démenez-vous un peu, et tâchez d’attraper quelque contre-seing. Portez-vous mieux que moi. Mme Denis est toujours bien paresseuse ; mais que voulez-vous qu’on vous mande

  1. Voyez la note, tome XVII, page 81.
  2. Examen des prophéties qui servent de fondement à la religion chrétienne (traduit de l’anglais de Collins, par le baron d’Holbach), 1768, in-8°.
  3. Esprit du judaïsme, ou Examen raisonné de la loi de Moïse, etc. (traduit de l’anglais de Collins, par le baron d’Holbach), 1770, in-8°.
  4. Éditeurs, de Cayrol et François.