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CORRESPONDANCE

ques ordres à donner concernant monsieur votre fils, ne nous épargnez pas ; tout ce qui habite Ferney vous est dévoué, ainsi que moi. Ni ma vieillesse ni mes maladies n’affaiblissent les sentiments d’attachement et de respect avec lesquels j’ai l’honneur d’être, monsieur, etc.

7181. — À M. LE COMTE D’ARGENTAL.
15 février.

Je vais bien vous ennuyer, mon cher ange ; je vous envoie une profession de foi que je fis l’autre jour à un de mes amis[1]. Je vous donne pour pénitence de la lire ; expiez par là votre énorme péché d’avoir jugé témérairement votre prochain. Vous sentez bien que c’est absolument Saint-Hyacinthe, et non pas moi, qui a dîné.

Je sais qu’il y a des fanatiques et des furieux ; je sais que les gens qui pensent sont condamnés aux bêtes. L’Europe réclame, l’Europe crie ; mais

La sagesse n’est rien, la force a tout détruit[2].

Je suis trop vieux pour déménager ; cependant, s’il faut aller mourir ailleurs, je prendrai ce parti ; ma haine contre certains monstres est trop forte.

J’ai ouï dire qu’on avait envoyé quelque chose à M. Suard. Je ne lui ai certainement rien envoyé, et le grand point est qu’il rende justice à cette vérité. Il est très-certain qu’il n’y a personne dans Paris qui puisse dire que je lui aie fait tenir un plat de ce Dîner auquel je n’assistai jamais. Il y a d’autres gens qui envoient.

Pour l’Homme aux quarante écus, on voit aisément que c’est l’ouvrage d’un calculateur : le ministère en doit être content. Je n’envoie jamais de brochures à Paris, mais je crois qu’on peut vous faire tenir celle-là sans vous compromettre. Je la chercherai si vous en êtes curieux, et vous l’aurez, mon très-cher ange ; vous n’avez qu’à ordonner.

  1. Voyez la lettre à Damilaville, No 7175.
  2. L’Orphelin de la Chine, acte I, scène ii.