douze cents livres, avec un char de foin, trois chars de paille et un tonneau de vin.
2° M. de Brosses m’a vendu à vie cette terre, qui ne me produit pas seize cents livres de rente[1], pour un capital de quarante-sept mille livres.
3° Dans ce capital de 47,000 livres il a compté pour cinq cents livres de rente un petit bois, dont lui-même avait fait couper la plus grande partie, et dans lequel je n’ai pas pris seulement une bûche pour me chauffer. Ce bois est vieux, entièrement dévasté par lui-même, qui avait vendu ce qu’il y avait de passable, et par les troupes, qui ont pillé le reste.
4° Dans les 47,000 livres que cette malheureuse acquisition m’a coûté, il y avait douze mille livres en réparations ; j’en ai fait pour plus de vingt mille livres.
5° Les choses sont tellement changées à Genève que jamais assurément aucun Genevois n’achètera cette terre.
6° S’il veut m’en faire un prix raisonnable je l’achèterai pour ma nièce afin de la joindre à Ferney, qui est une terre beaucoup plus seigneuriale, et qui n’est point un démembrement d’une autre terre comme l’est Tournay.
Tout cela n’est pas trop académique. Mais si M. de Brosses ne veut pas s’accommoder avec moi, je l’avertis que je vais m’arranger pour vivre autant que Fontenelle ; il doit trembler que je ne lui tienne parole.
Adieu, mon très-cher confrère, je vous embrasse très-tendrement sans aucune cérémonie.
Le froid excessif, la faiblesse excessive, la vieillesse excessive, et le mal aux yeux excessif, ne m’ont pas permis, monsieur, de vous remercier plus tôt des premiers volumes de votre Vocabulaire[2], et du Don Carlos de monsieur votre cousin[3]. Toute votre famille paraît consacrée aux lettres. Elle m’est bien chère, et personne n’est plus sensible que moi à votre mérite et à vos attentions.