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ANNÉE 1767

pédantes. Il est vrai qu’on s’y moque un peu de toute l’histoire ancienne, et qu’il y a de temps en temps de petites plaisanteries qui peuvent consoler de l’horreur de l’érudition, et du grec, et du latin, et de l’hébreu, et du turc. Il y a quelques mots un peu gros ; mais ce n’est pas ma faute : ils sont tirés de l’Écriture sainte, qui appelle toujours les choses par leur nom. Au reste, madame, vous pouvez choisir dans la liste des chapitres ce qui vous ennuiera le moins. Les quatre petites diatribes de feu l’abbé Bazin, qui sont à la fin du livre, pourront occuper peut-être un esprit aussi juste et aussi éclairé que le vôtre.

À l’égard de ce malheureux La Beaumelle, comme Votre Altesse sérénissime peut à présent en être instruite, il n’est accusé en aucune manière de son aventure de Gotha, dans le mémoire envoyé au ministère il y a deux ou trois mois. Votre auguste nom n’a été compromis en aucune manière. Il ne se trouve que dans la foule des rois et des princes que ce misérable a calomniés avec tant d’insolence, d’absurdité et d’ignorance. Il était absolument nécessaire de réprimer ce scandale. Comptez que ces livres-là, madame, se vendent mieux que les autres, par cela même qu’ils sont calomnieux. Ils se vendent aux foires de Francfort et de Leipsick ; ils vont jusqu’en Pologne et en Russie ; ils sont cités dans les dictionnaires allemands. Rien ne marche plus rapidement que l’imposture, et j’ai rempli un devoir indispensable en lui coupant les jarrets ; je devais cette justice à la vérité, si indignement outragée. Mais encore une fois, madame, votre nom ne sera point profané. Il est d’ailleurs gravé dans mon cœur, et il le sera jusqu’au dernier moment de ma très-languissante vie.

Je me mets aux pieds de monseigneur le duc et de toute votre auguste famille, avec l’attachement le plus inviolable et le plus profond respect. Votre vieux Suisse V.

6998. — À M. BORDES[1].
30 auguste.

Mon cher confrère, mettez dans votre bibliothèque le petit livre[2] que j’ai l’honneur de vous envoyer ; il est, dit-on, de l’auteur du Compère Matthieu.

  1. Editeurs, de Cayrol et François — Ce billet est de 1767, et non, comme ont cru les éditeurs, de 1768.
  2. L’Ingénu.