Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome45.djvu/253

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
243
ANNÉE 1767

beaucoup de monde, en annonçant qu’elle sera donnée suivant une nouvelle édition qu’on a reçue de Genève.

J’ai à vous demander pardon, mon cher ami, de vous avoir fait un rôle dont le fond n’est pas aussi intéressant que celui d’Indatire ; il n’a pas ce tragique fier et terrible de Ninias, d’Oreste, et de quelques rôles dans lesquels j’ai servi heureusement vos grands talents. C’est un très-jeune homme amoureux comme un fou, fier, sensible, empressé, emporté, qui ne doit mettre dans l’exécution de son personnage aucune de ces pauses, lesquelles font ailleurs un très-bel effet. Il doit surtout couper la parole à Obéide avec un empressement plein de douleur et d’amour. Je ne doute pas que vous n’ayez réparé, par cet art que vous entendez si bien, le peu de convenance qui se trouve peut-être entre ce personnage et le caractère dominant de votre jeu.

J’ai envoyé à M. d’Argental deux exemplaires pareils à celui que je vous envoie. J’ai été dans la nécessité absolue de m’en tenir à cette édition, parce que l’on réimprime actuellement la pièce en plusieurs endroits, et qu’on la traduit en italien et en hollandais. Je n’ai pas eu un moment à perdre, et il est impossible d’y rien changer désormais sans faire du tort aux traducteurs et aux éditeurs.

Je vous embrasse de tout mon cœur. Si vous avez de l’amitié pour moi, faites ce que je vous demande. Il vous sera bien aisé de faire porter sur les rôles les changements que vous trouverez à la main dans l’exemplaire ci-joint.

6865. — À M. DAMILAVILLE.
29 avril.

Monsieur, comme je sais que vous aimez les belles-lettres, je crois ne pas vous importuner en vous dépêchant les deux brochures[1] ci-jointes, qui ne se débitent pas encore dans la ville de Lyon, mais que je me suis procurées par le canal d’un de mes amis qui est fort au fait de la littérature.

On dit que M. de Voltaire, par le conseil des médecins, va quitter le pays de Gex. C’est en effet un climat trop dur pour sa vieillesse, et pour une santé aussi faible que la sienne. L’air de la Saône est beaucoup plus favorable. Mais je plains beaucoup

  1. Ce doit être la Lettre sur les Panégyriques (voyez tome XXVI, page 307), et les Homélies prêchées à Londres (voyez ibid., page 315).