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CORRESPONDANCE.

J’ose vous répondre que si les comédiens approchaient un peu de la manière dont nous jouons les Scythes à Ferney, s’ils avaient la vérité, la simplicité, l’empressement, l’attendrissement de nos acteurs, ils feraient fortune ; mais la même raison pour laquelle ils ne peuvent jouer ni Mithridate, ni Bérénice, ni tant d’autres pièces, leur fera toujours jouer les Scythes médiocrement. N’importe, je demande à cor et à cri deux représentations après Pâques.

Si mon cher ange parvient à faire chasser le monstre qui déshonore la littérature depuis si longtemps, les gens de lettres lui devront une statue. Je demande pardon à M. Coqueley ; mais un avocat plaide furieusement contre lui-même quand il se fait l’approbateur de Fréron : c’est se faire le receleur de Cartouche. On le dit parent de monsieur le procureur général : son parent devait bien lui dire qu’il se déshonorait. On ne connaît pas toutes les scélératesses de Fréron. C’est lui qui a répandu dans Paris la calomnie contre les Calas. Il a voulu engager un des gueux avec lesquels il s’enivre à faire des vers sur les prétendus aveux de la pauvre Viguière[1]. Je suis bien fâché que la vérité se soit trop tôt découverte. Il fallait laisser parler et triompher les Frérons pendant quinze jours, et ensuite montrer leur turpitude. Les colombes n’ont pas eu la prudence du serpent[2].

Déployez vos ailes, mes anges ; jetez le diable dans l’abîme, et tirez les Scythes du tombeau.

Respect et tendresse.

6840. — À M. DE BELMONT[3],
à bordeaux.
13 avril 1767, à Ferney.

Nouveaux changements dans la tragédie des Scythes[4].

Acte Ier, scène i (édition des Cramer) :

L’olivier à la main devant nous se présente…

  1. C’était la servante de Calas ; voyez lettre 6823.
  2. Matthieu, x, 16.
  3. Publié dans les Annales de la Faculté des lettres de Bordeaux, n° 3 (1880) par M. Barkhausen, d’après l’original, qui appartient à M. J. -E. Péry, notaire honoraire à Bordeaux.
  4. Nous nous bornerons à indiquer, sans les transcrire, les variantes qui sont dans notre texte, tome VI, page 332.