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mois la consolation de ma vie, est parti, et a pris son plus long pour aller voir un ami avec lequel il restera quelque temps. Je ne sais pas trop dans quel temps il se présentera devant mes anges.

J’ai envoyé à M. Élie de Beaumont toutes les pièces nécessaires pour entreprendre le procès des Sirven. Je ne crois pas qu’il trouve dans cette affaire la même faveur et le même enthousiasme que dans celle des Calas. Je connais notre public ; il se refroidit bien vite ; il n’aime pas les répétitions ; il lui faut du nouveau, et c’est ce qui fait la fortune de l’Opéra-Comique. Cependant je me flatte que mes anges voudront bien encourager Élie. Il est nécessaire que le mémoire soit très-bien fait, et qu’il soit dépouillé de toute cette déclamation du barreau, qui est le contraire de la véritable éloquence. Élie peut m’envoyer ce factum sous le premier contre-seing venu, et je répète encore que tous les paquets à mon adresse me sont très-fidèlement rendus.

J’ai lu une excellente lettre qui justifie l’arrêt du parlement[1] contre le clergé, en citant le procès de Guillaume Rose, évêque de Senlis, le plus détestable ennemi de Henri IV. Le bon Dieu bénisse l’auteur de cette lettre, quel qu’il soit ! Dieu me pardonne ! je crois que je suis actuellement parlementaire ; mais ce qui est bien plus sûr, c’est que je suis attaché à mes anges avec mon culte de latrie ordinaire.

Permettent-ils que j’insère ici ce petit mot[2] pour Roscius-Lekain ?

Et nos dîmes, mes divins anges ! et nos dîmes ! Ayez pitié de nous.


6131. — DE M. HENNIN[3].
À Paris, le 9 octobre 1765.

Il faut, monsieur, que la Renommée soit bien oisive pour m’avoir prévenu en vous annonçant ma nomination à la place de Genève. Au moment où j’ai reçu la lettre dont vous m’avez honoré, je tenais la plume pour vous due que, quand le ministre m’a offert cette place, j’ai pensé que j’allais vivre avec vous, et me suis cru ambassadeur.

Je voulais, monsieur, me remettre auprès de vous au point d’où les circonstances m’ont éloigné, vous redemander une amitié que j’ai trop peu cultivée, vous confesser de bonne foi que je me suis cru du nombre de ceux

  1. Voyez tome XXV, page 345.
  2. Il est perdu.
  3. Correspondance inédite de Voltaire avec P.-M. Hennin, publiée par Hennin fils, 1825.