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ANNÉE 1766.

dans sa douleur, avait donné l’alarme à son frère. Je vous prie de le rassurer et d’être très-tranquille ; il doit venir vous voir.

Mme Le Jeune est en lieu de sûreté ; elle n’a rien à craindre, elle n’est coupable de rien. Elle m’a dit qu’elle est sœur de ce célèbre capitaine Thurot, qui est mort si glorieusement au service du roi. Quelle destinée pour la sœur d’un si brave homme ! Elle m’a dit encore que Mme d’Argental ne sait rien ; ainsi vous ne l’inquiéterez point.

J’espère que tout ira bien. Nous faisons un procès criminel à la Doiret[1], qui est une friponne, et à son compère, qui est un scélérat. Voici la copie de la lettre que j’écris aujourd’hui à M. le v… c…[2]. Nous ne demandons point grâce, nous demandons justice : il n’y a certainement d’autre démarche à faire, sinon que vous parliez à M. de Maupeou, que vous lui fassiez voir l’absurdité qu’il y aurait à imaginer que je vends des livres étrangers et que j’envoie des cinquante et soixante volumes de dix ou douze ouvrages différents ; qu’on a pris indignement mon nom ; que cette affaire ne peut se traiter que judiciairement ; que nous demandons en justice la mainlevée de nos effets volés ; que le directeur du bureau a agi contre les ordonnances en n’arrêtant pas la femme Doiret et son complice, qui était venu avec elle dans le même carrosse ; que Mme Denis est en droit de répéter ses effets volés chez elle, etc., etc. Une conversation suffira. Je me flatte qu’on n’étourdira pas le roi de cette misère, et que tout sera fini, mon cher ange, par votre sagesse et votre activité. Cela ne m’empêchera pas de finir les Scythes ; les malheurs de l’homme ne font jamais rien au poëte. L’homme et le poëte vous adorent.


6637. — À M. LACOMBE[3].
27 décembre, partira le 29.

Je reçois, monsieur, votre lettre du 20. Je vous demande en grâce de me dire combien vous avez tiré d’exemplaires de la pièce[4] de mon ami. Je vais bientôt vous en donner une de moi, intitulée les Scythes. Je vous supplierai très-instamment de n’en pas tirer plus de sept cent cinquante exemplaires, et de laisser, si vous pouvez, les deux dernières feuilles composées, parce

  1. C’était le faux nom que Mme Le Jeune avait pris.
  2. Le vice-chancelier Maupeou.
  3. Éditeurs, de Cayrol et François.
  4. Le Triumvirat.