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ANNÉE 1766.

à qui vous voulez bien vous intéresser ; mais je ne veux et je ne dois demander que justice.

Quel est le Jean f… de janséniste[1] qui a dit que c’est tenter Dieu que de mettre à la loterie du roi ?

Quel est le conseiller usurier qui a fait banqueroute ?

Qu’a fait le duc de Mazarin ? Le cardinal de ce nom était un grand fripon.

Vous devriez bien au moins me mettre dans une partie de votre secret, et me dire à qui il faudrait que votre ami La Harpe écrivît une lettre en général. Il me semble que cela serait convenable.


6623. — À M. RIBOTTE[2].
20 décembre 1760.

Vous avez donc eu, monsieur, le déluge de Deucalion dans un des faubourgs de Montauban, pendant qu’on se plaignait de la sécheresse de nos cantons. Vous voyez bien que tout ne peut pas être inondé à la fois. Je me flatte que l’eau ne s’est pas élevée chez vous quinze coudées au-dessus des montagnes des Cévennes. Vous m’avez envoyé une description fort touchante de cet accident ; on dit qu’elle sera dans les papiers publics. C’est dommage que le jeune jésuite au derrière duquel marchait le grand Pompignan à la procession ne se soit pas trouvé dans vos cantons : ce ne serait pas par l’eau que les endroits bas auraient risqué de périr.

Genève est dans une grande crise ; on pourrait bien y envoyer des troupes, mais il faut espérer que les Genevois seront sages.


6624. — À M. CHARDON.
À Ferney, 20 décembre

Vraiment, monsieur, vous ne sauriez mieux placer vos bienfaits, et surtout en fait de colonie. J’en ai fondé une dans le plus bel endroit de la terre pour l’aspect, et dans le plus abominable

  1. D’Alembert, dans ses Réflexions sur l’inoculation, qui font partie du tome V de ses Mélanges, dit avoir lu autrefois une dissertation sur les loteries, où l’auteur soutient que jouer aux jeux de hasard c’est tenter Dieu. Il ajoute que l’ouvrage est d’un grave janséniste accrédité et considéré parmi les siens ; mais il ne le nomme pas.
  2. Bulletin de la Société de l’histoire du Protestantisme français ; Paris, 1856, page 246.