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ANNÉE 1766.

dame qui donne des carrousels[1] ; elle donne quelque chose de mieux ; elle a minuté de sa main un édit sur la tolérance universelle. L’Église grecque n’était pas plus accoutumée que la latine à ce dogme divin. Si elle continue sur ce ton, elle aura plus de réputation que Pierre le Grand.

Ne pourriez-vous point me dire ce que produira, dans trente ans, la révolution qui se fait dans les esprits, depuis Naples jusqu’à Moscou ? Je n’entends pas les esprits de la Sorbonne ou de la halle, j’entends les honnêtes esprits.

Je suis trop vieux pour espérer de voir quelque chose, mais je vous recommande le siècle qui se forme.

Adieu, je me console en vous écrivant, et vous me rendrez heureux quand vous m’écrirez.


6536. — À M. LACOMBE[2].
15 octobre.

Je suis très-aise, monsieur, que ce ne soit pas vous qui ayez fait des lettres sous le nom de la reine Christine[3]. La candeur de votre caractère ne s’accorde pas avec cette petite fraude littéraire. Votre Sosie ne vous vaut pas, et il mérite d’être bien battu par Mercure. Il est permis de cacher son nom ; mais il ne l’est pas de prendre le nom d’autrui, à moins que ce ne soit celui de Guillaume Vadé.

Mon ami, qui cache son nom, vous importune beaucoup. Il se rend enfin à une de mes objections sur ces trois vers du petit monologue de Fulvie, scène iv du IVe acte :


Vous tomberez, tyrans, vous périrez, perfides !
Vos mains ont trop instruit nos mains au parricides,
Le sang vous abreuva ; votre sang va couler.


En effet, Fulvie ne fait que répéter ce qu’elle a déjà dit ; cela cause de la langueur, et ces moments doivent être vifs et rapides. Voici comme il change tout ce morceau. Après ce vers qui finit la scène iii du IVe acte,


Je t’invoque, Brutus, je t’imite ; frappons ;

  1. Catherine II ; voyez la lettre 6468.
  2. Éditeurs, de Cayrol et François.
  3. Elles étaient d’un Lacombe, d’Avignon.