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ANNÉE 1766.

ficulté. Je ne vois pas pourquoi l’on défendrait le transport des pensées de province à Paris, tandis qu’on permet l’exportation de Paris en province.

Je suis encore plus surpris qu’on n’ait pas respecté l’enveloppe de M. de Courteilles, et que l’on prive un conseiller d’État d’un écrit sur la jurisprudence. Vous recevrez cet écrit par quelque autre voie, et vous jugerez si on doit le traiter avec tant de rigueur.

Vous n’ignorez pas qu’on a fait en Hollande deux éditions de quelques-unes de mes lettres, qu’on a cruellement falsifiées, et auxquelles on a joint des notes d’une insolence punissable contre les personnes du royaume les plus respectables. On m’a conseillé de m’adresser à un nommé M. du Clairon, qui est, dit-on, actuellement commissaire de la marine, ou consul à Amsterdam : il est auteur d’une tragédie de Cromwell, qu’il a dédiée à M. le duc de Praslin. Je ne veux pas croire qu’il soit trop instruit du mystère de cette abominable édition ; mais je crois qu’il peut aisément se procurer des lumières sur l’éditeur.

M. le prince de Soubise, et plusieurs autres personnes d’une grande distinction, sont très-outragés dans ces lettres. Il est nécessaire que je mette au moins dans les journaux un avertissement[1] qui démontre et qui confonde la calomnie. Heureusement les preuves sont nettes et claires : j’ai en main les certificats de ceux à qui j’avais écrit ces lettres, qu’un faussaire a défigurées. J’espère que M. du Clairon, qui est sur les lieux, voudra bien me donner des éclaircissements sur cette manœuvre infâme. Je lui écris[2] qu’ayant, comme lui, M. le duc de Praslin pour protecteur, j’ai quelque droit d’espérer ses bons offices, dans cette conjoncture, à l’abri d’une telle protection ; que le livre est imprimé par Marc-Michel Rey, imprimeur de J.-J. Rousseau, à Amsterdam ; que Jean-Jacques y est loué, et les hommes les plus respectables chargés d’outrages ; que je le supplie de vouloir bien me donner sur cette œuvre d’iniquité les notions qu’il pourra acquérir, et que tous les honnêtes gens lui en auront obligation. Je me flatte que M. le duc de Praslin permettra la liberté que je prends de dire un mot dans cette lettre de mon attachement pour lui, et de la protection dont il m’honore.

  1. Il l’intitula Appel au public ; voyez tome XXV, page 579.
  2. La lettre de Voltaire est perdue.