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Adieu, monsieur. Je ne peux mieux finir ma carrière qu’en regrettant de n’avoir pas eu l’honneur de vivre avec vous. Tant que je vivrai, vous n’aurez point de partisan plus zélé, ni d’ami plus véritable.


6076. — À M. LE MARÉCHAL DUC DE RICHELIEU.
30 juillet.

Il n’est pas juste, monseigneur, qu’un vieux amateur et serviteur du tripot comique, comme moi, ait chez lui Mlle Clairon, sans vous demander vos ordres. Elle vient d’arriver ; j’ignore encore l’état de sa santé ; j’ignore le parti qu’elle sera obligée de prendre, et je crois que je dois demander vos ordres pour savoir sur quel ton je dois lui parler, et quelles sont vos intentions. Ce n’est pourtant pas que je pense que mes conseils aient beaucoup d’autorité sur elle ; il est à croire que M. le comte de Valbelle aura beaucoup plus de crédit que moi ; mais enfin, si vous avez quelques ordres à me donner, je les exécuterai très-fidèlement. Je suis assez comme cette vieille m… qui se mourait, et qui disait à ses demoiselles : « Croyez-vous que je puisse tromper quelqu’un en l’état où je suis ? » Comptez, monseigneur, que l’envie de vous plaire sera ma dernière volonté.

La mort du duc de Parme est une belle leçon de l’inoculation ; son fils, qui a eu la petite vérole artificielle, est en vie, et le père, qui a négligé cette précaution, meurt à la fleur de son âge. Les vieilles femmes inoculent elles-mêmes leurs petites-filles dans le pays que j’habite. Est-il possible que le préjugé dure en France si longtemps !

Je suis actuellement auprès de M. Tronchin ; ainsi vous me pardonnerez de vous parler d’inoculation. J’ai un peu recouvré la vue, mais je perds tout le reste. Conservez votre santé, ce bien sans lequel les autres ne sont rien, et vivez, s’il se peut, aussi longtemps que votre gloire.


6077. — À M. BEAUMONT-JACOB[1],
banquier à genève.
À Ferney, 3 auguste.

J’ai, monsieur, des lettres de change pour le payement d’août, chez MM. Couderc et Passavant, à Lyon. Je m’adresse à vous

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.