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ANNÉE 1766.
6397. — À M.  DAMILAVILLE.
12 juillet.

Mon cher frère, Polyeucte et Néarque[1] déchirent toujours mon cœur ; et il ne goûtera quelque consolation que quand vous me manderez tout ce que vous aurez pu recueillir.

On dit qu’on ne jouera point la pièce de Collé[2] : je m’y intéresse peu, puisque je ne la verrai pas ; et, en vérité, je suis incapable de prendre aucun plaisir après la funeste catastrophe dont on veut me rendre en quelque façon responsable. Vous savez que je n’ai aucune part au livre[3] que ces pauvres insensés adoraient à genoux. Il pleut de tous côtés des ouvrages indécents, comme la Chandelle d’Arras[4], le Compère Matthieu[5], l’Espion chinois[6] ; et cent autres avortons qui périssent au bout de quinze jours, et qui ne méritent pas qu’on fasse attention à leur existence passagère. Le ministère ne s’occupe pas sans doute de ces pauvretés : il n’est occupé que du soin de faire fleurir l’État ; et l’intérêt réduit à quatre pour cent est une preuve d’abondance.

Je tremble que M.  de Beaumont ne se décourage : je vous conjure d’exciter son zèle. J’ai pris des mesures qui vont m’embarrasser beaucoup, s’il abandonne cette affaire des Sirven. Parlez-lui, je vous prie, de celle d’Abbeville ; il s’en sera sans doute informé. Je ne connais point de loi qui ordonne la torture et la mort pour des extravagances qui n’annoncent qu’un cerveau troublé. Que fera-t-on donc aux empoisonneurs et aux parricides ?

Adieu, mon cher ami ; adoucissez, par vos lettres, la tristesse où je suis plongé.


6398. — À M.  LACOMBE[7].
12 juillet.

Vous devez recevoir incessamment, monsieur, par la diligence de Lyon, l’ouvrage de mon ami[8].

  1. Le chevalier de La Barre et le chevalier d’Étallonde.
  2. La Partie de chasse de Henri IV.
  3. Le Dictionnaire philosophique.
  4. Poëme en dix-huit chants (par l’ahbc Du Laurens), 1765, in-8o.
  5. Roman du même auteur, 1766, trois volumes in-8o.
  6. Ouvrage de Goudar ; voyez tome XLIII, page 573.
  7. Éditeurs, de Cayrol et François.
  8. Le Triumvirat.