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ANNÉE 1766.

gédie, pas même celui d’une farce. Vous savez que j’ai toujours été extrêmement éloigné de jouer ma partie dans ce tripot ; vous savez que, dès que vous eûtes la bonté de m’envoyer la consultation de votre avocat, je la remis à M.  Hennin dès le moment de son arrivée ; je ne voulais que la paix, sans prétendre à l’honneur de la faire. Il est bien ridicule que j’aie eu depuis des tracasseries pour un compliment[1] ; mais quand on a affaire à des esprits effarouchés et inquiets, on s’expose à voir les démarches les plus simples et les plus honnêtes produire les soupçons les plus injustes. Je vous prédis encore que jamais on ne parviendra à la plus légère conciliation entre les esprits genevois. On pourra leur donner des lois, mais on ne leur inspirera jamais la concorde. Je ne change point d’opinion sur la manière dont toute cette affaire doit finir : mais je me garde bien de vous presser d’être de mon avis.

Je compte toujours sur la protection de MM. de Praslin et de Choiseul, dont je vous ai l’obligation, et c’est une obligation assez grande. J’attendrai tranquillement la décision des plénipotentiaires ; et, quelque intéressé que je sois, par bien des raisons, à l’arrêt qu’ils doivent rendre, je ne chercherai pas même à pressentir leur manière de penser. Je voudrais trouver un moyen de vous envoyer la petite collection qu’on a faite des lettres de M. Baudinet et de M.  Covelle[2] ; cela me paraît plus amusant que les querelles sur le droit négatif. Je vous jure, avec un ton très-affirmatif, mes chers anges, que vos bontés font la consolation et le charme de ma vie.


6350. — À M.  DAMILAVILLE.
23 mai.

C’est pour vous dire, mon cher ami, que M.  Boursier vous a envoyé, sous l’enveloppe de M.  de Courteilles, la défense de l’illustre de Thou[3] contre les accusations du sieur Bury. Je soupçonne que le manuscrit est plein de fautes ; mais la faiblesse de mes yeux et mon état un peu languissant ne m’ont pas permis de le corriger. Je pense que vous trouverez dans cet écrit des anecdotes curieuses et instructives. Si votre Merlin ne peut

  1. Voyez la lettre 6328.
  2. La collection des Lettres sur les miracles.
  3. C’est la brochure intitulée le Président de Thou justifié, etc. ; voyez tome XXV page 477.