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Vous m’aviez promis de petits paquets par la diligence, adressés à MM. Levesque et fils, banquiers à Lyon, avec lettre d’avis. Souvenez-vous de vos promesses, et ne laissez point mourir votre frère d’inanition.


6269. — À M.  LE COMTE D’ARGENTAL.
À Ferney, 12 février.

Il est vrai, mes anges gardiens, que M.  le duc de Praslin ne pouvait faire un meilleur choix que celui de M.  le chevalier de Beauteville ; la convenance y est tout entière. Vous savez que je suis intéressé plus que personne à tous les arrangements qu’on peut faire à Genève. J’ai quelque bien dans cette ville, mes terres sont à ses portes, beaucoup de Genevois sont dans ma censive ; je vous supplie donc d’obtenir de M.  le duc de Praslin qu’il ait la bonté de me recommander à monsieur l’ambassadeur.

Quant à l’objet de la médiation, je puis assurer qu’il n’y a qu’un seul point un peu important ; et je crois, avec M.  Hennin, que la France en peut tirer un avantage aussi honorable qu’utile. Il s’agit des bornes qu’on doit mettre au droit que les citoyens de Genève réclament de faire assembler le conseil général, soit pour interpréter des lois obscures, soit pour maintenir des lois enfreintes.

Il faut savoir si le petit conseil est en droit de rejeter, quand il lui plaît, toutes les représentations des citoyens sur ces deux objets ; c’est ce qu’on appelle le droit négatif.

Vous pensez que ce droit négatif, étant illimité, serait insoutenable ; qu’il n’y aurait plus de république ; que le petit conseil des Vingt-Cinq se trouverait revêtu d’un pouvoir despotique, que tous les autres corps en seraient jaloux, et qu’il en naîtrait infailliblement des troubles interminables ; mais aussi il serait également dangereux que le peuple eût le droit de faire convoquer le conseil général selon ses caprices.

Il est très-vraisemblable que les médiateurs, éclairés et soutenus par M.  le duc de Praslin, fixeront les cas où le conseil général, qui est le véritable souverain de la république, devra s’assembler. J’ose espérer que les médiateurs, étant garants de

    il est à présumer cependant que le gouvernement, sans vouloir prêter son autorité à cette publicité, ferme les yeux là-dessus, et que le tout se fait avec son consentement tacite. »