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Mandez-moi, monsieur, définitivement si la proposition de M. Jean Maire, trésorier de Montbéliard, vous convient ou non, afin que je prenne mes mesures.

J’ai l’honneur d’être, avec les sentiments les plus vrais, monsieur, votre très-humble et très-obéissant serviteur.

P. S. Mme  Denis et moi, nous vous souhaitons la bonne année.


6214. — À M.  LE COMTE D’ARGENTAL.
À Ferney, 3 janvier.

Eh mon Dieu ! mon ange tutélaire, pourquoi ne serait-ce pas vous qu’on nommerait médiateur[1] ? Votre ministère parmesan y mettrait-il obstacle ? Il me semble que non. Ce ministère ne vous empêche pas d’être conseiller d’honneur au parlement, et je vous avertis que nos Genevois désirent passionnément un magistrat.

Vous verrez, par l’imprimé ci-joint[2], qui m’est tombé entre les mains, que les perruques de Genève ne doivent point être ébouriffées de la façon dont on parle des affaires et des miracles de Jean-Jacques : je sais que quelques personnes m’ont attribué plusieurs de ces brimborions ; mais, Dieu merci, on ne me convaincra jamais d’y avoir eu la moindre part. J’en suis aussi innocent que du Dictionnaire philosophique, qu’on m’a si indignement imputé. Il y a dans Neuchâtel, à Lausanne, et dans Genève, des gens de beaucoup d’esprit qui se plaisent à écrire sur ces matières. On en avait un très-grand besoin. Ces cantons et une grande partie de l’Allemagne étaient plongés dans la plus horrible superstition : on sort à présent de cette fange ; mais, croyez-moi, il y a encore en France bien des gens embourbés, qui, tout couverts d’ordures, ne veulent pas qu’on les nettoie. L’opinion gouverne les hommes, et les philosophes font petit à petit changer l’opinion universelle.

Voici des vers[3], mes divins anges, que j’ai faits tout d’une tire

  1. Dans sa lettre du 21 décembre 1765, n° 6194, Voltaire proposait de nommer médiateur Hennin, déjà résident à Genève. Cette idée ayant été rejetée, Voltaire pensait à d’Argrental. Ce fut le chevalier de Beauteville, ambassadeur de France en Suisse, qui fut nommé médiateur pour la France dans les affaires de Genève.
  2. La Collection des Lettres sur les miracles.
  3. Épître à Henri IV, sur ce qu’on avait écrit à l’auteur que plusieurs citoyens de Paris s’étaient mis à genoux devant la statue équestre de ce prince pendant la maladie du dauphin (voyez tome X).