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contre la philosophie par un homme qui se disait philosophe me désespèrent.

Frère Gabriel doit avoir envoyé une petite lettre de change payable à Archimède[1]. Je verrai lundi les premières épreuves, il sera servi comme il mérite de l’être. Si vous voulez être informé de toutes les horreurs de Jean-Jacques, écrivez à Gabriel, il vous en dira des nouvelles. Le nom de Rousseau n’est pas heureux pour la bonne morale et la bonne conduite.

Au reste, mon cher frère, je serais très-fâché que mes Lettres prétendues secrètes[2] fussent débitées à Paris. Quelle rage de publier des lettres secrètes ! J’ai prié instamment M. Marin de renvoyer ces rogatons en Hollande, d’où ils sont venus. Je suis bien las d’être homme public, et de me voir condamné aux bêtes comme les anciens gladiateurs et les anciens chrétiens. L’état où je suis ne demande que le repos et la retraite. Il faut mourir en paix ; mais, afin que je meure gaiement, ècr. l’inf…


5879. — À M. LE COMTE D’ARGENTAL.
À Ferney, 12 janvier.

Mes divins anges, j’ai oublié, dans ma requête à M. le duc de Praslin, de spécifier que ce vieux de Moultou, qui veut promener sa vieille vessie à Montpellier, a un fils qu’on appelle prêtre, ministre du saint Évangile, pasteur d’ouailles calvinistes, et qui n’est rien de tout cela ; c’est un philosophe des plus décidés et des plus aimables. J’ignore si sa qualité de ministre évangélique s’oppose aux bontés d’un ministre d’État ; j’ignore s’il est nécessaire que M. le duc de Praslin ait la bonté de faire mettre, dans le passe-port, le sieur Moultou et son fils le prêtre. Je m’en rapporte uniquement à la protection et à la complaisance de M. le duc de Praslin ; les maux que souffre Moultou le père sont dignes de sa pitié. Il n’y a pas un moment à perdre si on veut lui sauver la vie. Tronchin inocule, mais il ne taille point la pierre.

  1. D’Alembert, pour son ouvrage Sur la Destruction des jésuites.
  2. Voyez tome XXV, page 59, et XXVI, 135.