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Montrez, je vous en prie, cette double copie à votre ami M. de Beaumont. Je crois que l’article qui regarde les avocats[1] ne lui déplaira pas ; je voudrais d’ailleurs avoir son avis sur le fond du procès. Je vous avoue que je serais tenté de proposer à M. de Foncemagne de prendre une demi-douzaine d’avocats pour arbitres. Il me paraît qu’on ne peut former que deux opinions sur cette affaire : l’une, que le testament attribué au cardinal n’est point de lui ; l’autre, que, s’il en est, il a fait un ouvrage impertinent. Il y a plus d’un livre respecté dont on pourrait en dire autant.

Tâchez, mon cher frère, d’animer frère Protagoras[2] : c’est l’homme du monde qui peut rendre les plus grands services à la cause de la vérité. Les mathématiques sont fort belles ; mais, hors une vingtaine de théorèmes utiles pour la mécanique et pour l’astronomie, tout le reste n’est qu’une curiosité fatigante. Plût à Dieu que notre Archimède pût trouver un point fixe pour y pendre le fanatisme !


5828. — À M. DE BRENLES.
Ferney, 23 novembre.

Mon cher philosophe, je serais bien tenté de venir chez vous avec mon bâton d’aveugle ou avec mon chien. Vous n’auriez pas dans votre maison un philosophe cynique ennemi des hommes ; mais malheureusement il faudra que j’attende que ma fluxion soit passée ; peut-être durera-t-elle tout l’hiver, et alors il faudra attendre le printemps. Je suis pénétré de vos offres charmantes ; il faut que vous ajoutiez une bonté nouvelle à toutes celles que vous me témoignez ; que cela soit entre nous deux seuls, je vous en prie.

Il s’agit de savoir s’il y a quelqu’un à Lausanne qui ait un peu de crédit sur l’esprit du prince de Wurtemberg, et qui pût seconder la noblesse de ses sentiments, en le portant à faire une action digne de lui, action juste et honnête, et qui n’exige de sa part qu’un seul mot qui ne peut le compromettre.

Mille respects à madame la philosophe. V.

  1. Voyez tome XXV, page 302.
  2. D’Alembert.