dieu, si je pouvais loger dans la maison du Chêne[1], ou bien si je pouvais trouver ailleurs un appartement bien chaud et un bon lit, avec une petite chambre pour Wagnière[2], et de quoi loger seulement deux domestiques ; mais je crois que cela est fort difficile à trouver, et je pense que vos cabarets sont détestables. Je suis un peu sybarite par le corps, quoique je sois assez stoïcien par l’âme ; j’aime fort la Suisse, mais je ne puis avoir les mêmes sentiments pour son climat. Je suis surtout très-fâché actuellement contre M. Saint-Martin, qui ne paye pas plus l’été qu’il nous doit que Mme d’Hacqueville ne paye le loyer de sa maison. Quoi qu’il en soit, mon cher philosophe, aimez-moi. Je présente mes respects à madame votre femme. V.
Si vous avez été malade, mon cher monsieur, je suis devenu aveugle depuis que les neiges ont couvert nos montagnes ; c’est ce qui m’arrive tous les ans, et bientôt je perdrai entièrement la vue. Il aurait été bien à souhaiter, en effet, que les trois cents petits pâtés[3] dont vous m’avez parlé tant de fois eussent été mangés à Bordeaux ; mais un gourmand, qui arrive de cette ville, m’assure qu’il n’a pu en trouver chez aucun pâtissier, et c’est de quoi on m’avait déjà assuré plus d’une fois. M. le maréchal de Richelieu, qui aime les petits pâtés plus que personne, en aurait fait servir à sa table ; il faut assurément qu’il soit arrivé malheur à votre four, et qu’il n’ait pas été assez chaud. Je ne sais pas pourquoi vous m’attribuez une pièce de Grécourt[4], qui n’est que grivoise, et dont vous citez ce vers :
L’Amour me dresse son pupitre.
Vous deviez bien sentir que la belle chose dont il est question ne ressemble point du tout à un pupitre. Ce n’est pas là le ton de la bonne compagnie.
Tous les habitants de notre petit ermitage vous font, monsieur,