J’oubliais de vous dire que frère Gabriel n’a point imprimé assez d’exemplaires du Corneille. Je l’ai laissé, comme de raison, le maître de toute l’affaire. S’il avait imprimé autant d’exemplaires qu’il y avait de souscripteurs, il aurait eu plus d’argent, et Mlle Corneille aussi ; mais il n’a compté que ceux qui avaient fait le premier payement. J’en suis bien fâché, mais ce n’est pas ma faute ; j’ai rempli mon devoir, et cela me suffit. Ceux qui n’ont pas eu d’exemplaires, et qui en demandent, peuvent en prendre chez M. Corneille, à qui le roi en a donné cent cinquante : Mme d’Argental se fait un plaisir d’en débiter pour gratifier cet honnête homme. Je m’étonne que cela ne soit pas public dans Paris ; mais dans Paris on ne sait jamais rien, on n’est instruit de rien, on ne sait à qui s’adresser, on ignore tout au milieu du tumulte.
Frère Gabriel a bien mal fait encore d’imprimer les trois volumes de remarques[1] à part, sans me le dire. Les fautes d’impression sont innombrables. Il y a assez loin de ma campagne à Genève, et je n’ai pu revoir les épreuves. Tout va de travers en ce monde. Dieu soit loué !
Ma main me refuse le service aujourd’hui, monseigneur, attendu que mes yeux sont affligés de leur ancienne fluxion ; ainsi mon héros permettra que je reprenne ma charge de dictateur. Il m’a été absolument impossible d’aller à Genève faire ma cour à M. le duc de Lorges. Vous savez d’ailleurs que je n’aime à faire ma cour qu’à vous.
M. le duc de Wurtemberg n’est point allé à Venise, comme on le disait ; il reste chez lui pour mettre ordre à ses affaires, ce qui ne sera pas aisé. Son frère[2] est toujours mon voisin, et mène la vie du monde la plus philosophique. Quoique les finances de la France soient encore plus dérangées que celles du Wurtemberg, il paraît cependant qu’on a beaucoup de confiance dans le nouveau ministère. M. de Laverdy fait assurément mieux que