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pour prétexte pour débiter mes rêveries, comme j’ai fait sur l’article des songes[1] : cela m’égayera quelquefois, et pourra égayer la Gazette. Mais à présent je n’ai pas trop envie de rire, mes yeux ne vont pas trop bien, ma santé fort mal. Que mes deux anges se portent bien, et je suis consolé.


5695. — À M. LEKAIN[2].
Aux Délices, 30 juin.

Le petit jésuite me charge de prier mon grand acteur de remettre au principal conjuré la drogue en question, et de ne la montrer à personne au monde. On prétend que si les autres avaient joué aussi bien que mon grand acteur, si Pompée avait été rendu avec une douleur sombre et terrible, si, etc., la chose eût été plus intéressante. L’ex-jésuite dit qu’il réparera ce petit mal.

L’ami de l’ex-jésuite fait mille tendres compliments à mon grand acteur.


5696. — À M. DE LA HARPE.
À Ferney, 30 juin.

Un vieux serviteur de Melpomène doit aimer son jeune favori : aussi, monsieur, pouvez-vous compter que je fais mon devoir envers vous[3]. Vous m’aviez flatté d’un petit voyage avec M. de Ximenès.

Je suis bien aise d’apprendre que l’abbé Asselin[4] est encore en vie. Il y a environ soixante ans que je fis connaissance avec lui ; et je crois qu’il était majeur. Je lui souhaite les années de Fontenelle.

Vous m’avez dit aussi un mot de J.-J. Rousseau ; c’est un étrange fou que cet étrange philosophe. J’avais encore de la voix et des yeux il y a trois ans, et je jouais les vieillards assez passablement sur le théâtre de mon petit château de Ferney ; Mme Denis (par parenthèse) jouait les rôles de Mlle Clairon avec

  1. Cet article sur les songes avait paru dans la Gazette littéraire du 20 juin ; voyez tome XXV, page 192.
  2. Éditeurs, de Cayrol et François. — On remarquera que c’est la seule lettre de ce jour datée des Délices.
  3. Voltaire lui envoyait un exemplaire du Théâtre de Pierre Corneille avec des commentaires, 1764, douze volumes in-8o.
  4. Voyez la note, tome XXXIII, page 495.