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pour elle. Il est vrai que je suis fort embarrassé à son sujet. Vous savez, monsieur, que toutes les puissances de ce monde ont été en guerre ; les gens de lettres, qui sont fort loin d’être des puissances, y sont aussi ; il se trouve que l’homme de mérite en question fait la guerre à des hommes de mérite dont je suis l’ami ; je voudrais pouvoir être leur conciliateur.

Je suis moi-même en guerre de mon côté avec des gens qui sont ses ennemis ; tout cela est difficile à arranger, mais je conclus qu’il faut rire, et passer ses jours gaiement.

J’ai l’honneur d’être, avec tous les sentiments que j’ai voués à M. et à Mme de Fresney, monsieur, votre, etc.


5670. — À M. LE COMTE D’ARGENTAL.
Aux Délices, 11 juin.

Je me flatte que mes anges voudront bien faire payer à la mémoire de M. le comte Algarotti le petit tribut ci-joint[1].

Est-il vrai qu’on va jouer Cromwell, et que c’est le Cromwell de Crébillon[2], achevé par un M. du Clairon ? Si on fait parler ce héros du fanatisme comme il parlait, ce sera un beau galimatias, mais c’est avec du galimatias qu’il parvint à gouverner l’Angleterre, et c’est ainsi qu’on a quelquefois subjugué le parterre.

Voilà donc l’arrêt des juges de Toulouse cassé ; mais les os du pauvre Calas ne seront pas raccommodés. Qu’obtiendra-t-on en suivant ce procès ? Les juges de Toulouse seront-ils condamnés à payer les frais de leur injustice ?

Je baise le bout des ailes de mes anges en toute humilité.


5671. — À M. DE LA SAUVAGÈRE[3].
Aux Délices, 11 juin.

Je vous remercie, monsieur, de la bonté que vous avez eue de me faire part de vos découvertes et de vos observations. Je m’applaudis de penser comme vous. J’ai toujours cru que la nature a de grandes ressources. Je suis dans un pays tout plein de

  1. Voyez tome XXV, page 195.
  2. La tragédie de Cromwell, représentée le 7 juin 1764, n’était pas de Crébillon, mais d’Antoine Maillet du Clairon, mort en 1809.
  3. Voyez la note, tome XXVII, page 148.